Espace : les événements à ne pas rater en 2022
Chaque année, j’essaye de décrire les évènements qui seront très intéressants à suivre dans l’actualité spatiale en 2022. Mais comme chaque année, certains pourront être décalés à l’année suivante.
2022 devrait voir enfin le retour sur ou autour de la Lune, de nouveaux lanceurs, et toujours plein de vols habités. Voici mon panorama, non exhaustif/
2022 année lunaire ?
En 2022, la Lune devrait redevenir l’objet de notre attention spatiale. Beaucoup des missions suivantes étaient attendues en 2021 mais entre la crise sanitaire et des retards dans les développements, on devrait finalement les voir en 2022.
Artemis 1, un premier vol en orbite lunaire pour le vaisseau Orion. Cette fois-ci, le lanceur SLS, Space Launch System est en phase de préparation finale. Le premier vaisseau Orion est déjà installé. Donc rendez-vous au 2e trimestre 2022 ?
En mars, la mission de la NASA Capstone devrait être lancée par une Electron de Rocket Lab. Ce cubesat est une mission d’analyse de réduction des risques pour la future station Lunar Gateway car il fonctionnera sur une orbite de halo presque rectiligne autour de la Lune [article à venir courant 2022 ! ]
L’atterrisseur Nova-C de l’entreprise américaine Intuitive Machines, développé dans le cadre du Google Lunar XPrize, et sélectionné par la NASA pour embarquer des charges utiles dans le cadre du Commercial Lunar Payload Services (CLPS), devrait décoller à bord d’une Falcon 9 au début 2022. Le lancement initialement prévu pour octobre 2021 avait été reporté par SpaceX.
Peregrine-1 d’Astrobotic, également développé dans le cadre du Google Lunar XPrize, et sélectionné par la NASA pour embarquer des charges utiles dans le cadre du CLPS, devrait décoller en 2022 à bord de la première Vulcan d’ULA. Il emporte notamment le rover japonais Yaoki.
Mais des incertitudes planent sur la disponibilité des moteurs pour le lanceur [voir ci-après].
Un autre des finalistes du Google Lunar XPRIZE devrait décoller en 2022 et se poser sur la Lune : Hakuro-R du japonais ispace. C’est la partie 1 de la mission, la partie 2 étant le déploiement d’un rover en 2023.
La première mission devrait embarquer toutefois le rover Rashid des Emirats Arabes Unis.
[Et encore un article à écrire !]
Ilustration du lander Hakuro-R par ispace
En août, il est prévu le lancement du premier orbiteur lunaire sud-coréen : KPLO, Korean Pathfinder Lunar Orbiter.
Il devrait orbiter à environ 100 km de la surface de la Lune.
Image : rendu du Korean Pathfinder Lunar Orbiter (KPLO) (crédit : KARI)
La Russie sera-t-elle enfin de retour sur la Lune avec Luna-25 ?
Une nouvelle mission depuis Luna-24 en 1976, avec l’objectif d’alunir près du pôle sud lunaire !
Mais il semblerait qu’il y ait des difficultés techniques qui pourraient encore retarder le lancement.
Après l’échec de l’atterrissage de Chandrayaan-2, mais le succès de la mise en orbite lunaire, l’ISRO va retenter d’alunir avec Chandrayaan-3. Cette fois-ci il n’y aura qu’un atterrisseur et un rover, pas d’orbiteur.
Est-ce que ce sera bien pour 2022 ? L’Inde durement touchée par la crise sanitaire a-t-elle pu avancer sur ce projet ? Rdv vers l’été semble-t-il.
L’exploration et la science continuent !
Les rover Curiosity et Perseverance devraient continuer leurs missions scientifiques sur Mars et à faire des prélèvements de sol martien.
La mission Insight devrait poursuivre sa mission de traque des séismes martiens, mission actuellement prévue de se terminer en décembre 2022.
Mais on attend le décollage de la mission russo-européenne Exomars prévu actuellement le 20 septembre 2022 pour un atterrissage en juin 2023 et le premier rover européen à la surface de Mars : Rosalind Franklin.
Photo : La plate-forme d’atterrissage Kazachok de la mission ExoMars est révélée lorsque la partie arrière du module de descente est soulevée au-dessus. Les rampes des plates-formes et les panneaux solaires sont vus en configuration repliée (crédit Thales Alenia Space).
On espère très rapidement en début d’année d’avoir des bonnes nouvelles sur le déploiement complet du pare-soleil et des miroirs du James Webb Space Telescope, ainsi que les premières images, probablement à l’été.
Image : le JWST déployé chez Northrop Grumman.
Solar Orbiter devrait refaire un survol de Vénus en septembre et un passage au plus près du Soleil en octobre.
BepiColombo devrait effectuer son deuxième passage au plus près de Mercure en juin.
Illustration de l’orbite de Solar Orbiter (crédit ESA)
La mission DART, Double Asteroid Redirection Test, de la NASA devrait impacter en septembre la lune de l’astéroïde binaire géocroiseur (65803) Didymos afin de vérifier si la déviation d’un astéroïde géocroiseur est possible. [article à venir]
A l’été 2022, la mission Psyche de la NASA doit décoller à bord d’une Falcon Heavy pour un long voyage qui va l’amener en 2026 pour orbiter l’astéroïde Psyche.
Ce corps situé dans la Ceinture d’astéroïdes entre Mars et Jupiter pourrait être le noyau de nickel-fer exposé d’une planète primitive.
Illustration de Psyche arrivé sur l’astéroïde du même nom (crédit https://psyche.asu.edu/).
En 2020 et 2021, à cause de la crise sanitaire, on n’a pas eu de nouvelles de la mission Aditya-L1 de l’agence spatiale indienne, l’ISRO. En 2022, verra-t-on le lancement de la sonde vers le point de Lagrange L1 Terre-Soleil afin d’étudier la photosphère et la chromosphère de notre étoile et pour mesurer le champ magnétique solaire ?
Dessin : crédit ISRO
Au 2e trimestre 2022, le 3e catalogue d’astres observés par Gaia sera publié : le Gaia Data Release 3 ou DR3
Le satellite européen a déjà cartographié plus de 100 000 Gb de données à ce jour, cartographié plus de 1800 milliards d’étoiles de notre Voie Lactée et plus de 5700 publications scientifiques sont parues.
Et il y aura de nombreux nouveaux satellites d’observations de la Terre pour mieux étudier le changement climatique et les évolutions à la surface du globe. Difficile de les nommer tous ici.
Encore beaucoup d’activités pour les vols habités
Pour la Station Spatiale Internationale, au-delà des habituels cargos de ravitaillement (plusieurs Progress et cargos Dragon et Cygnus sont prévus), voici les grandes lignes du programme de 2022 :
Actuellement dans l’espace, les équipages de Crew-3 et du Soyouz MS-18 et 19. Mark Vande Hei et Pyotr Dubrov sont arrivés le 9 avril 2021 à bord de l’ISS et ne devraient en repartir que le 28 mars, soit une mission de 353 jours.
Mark Vande Hei devrait cumuler alors 521 jours dans l’espace, dépassant Scott Kelly et devenant le 3e astronaute américain avec la plus longue durée dans l’espace avec ses 2 missions.
L’équipage de l’ISS le 12/11/2021 : de gauche à droite, Pyotr Dubrov (Roscosmos), Thomas Marshburn (NASA), Anton Shkaplerov (Roscosmos), Raja Chari, Mark Vande Hei et Kayla Barron (NASA) et Matthias Maurer (ESA) (crédit NASA)
Starliner, le début des vols avec équipage ? Auparavant, il faudrait réussir le 2e vol d’essai (OFT-2) vers l’ISS sans équipage. Prévu à l’été 2021, il avait finalement été reporté pour des soucis sur des vannes du module de service.
Le premier vol avec équipage ne serait dorénavant pas avant l’automne 2022. Mais avec quel équipage ? La NASA annonçait le 7 octobre la réaffectation de 2 de ses astronautes prévus initialement sur le premier vol habité Starliner : Nicole Mann et Josh Cassada ont été réassignés au vol Crew-5 sur Crew Dragon.
Logo de la mission OFT-2
Après Thomas Pesquet et Matthias Maurer dans l’ISS en 2021, c’est Samantha Christoforetti qui va rejoindre la Station Spatiale en 2022 pour une présence continue européenne. Ce sera sa 2e mission longue durée. Elle décollera à bord de Crew Dragon avec l’équipage Crew-4. Elle deviendra commandante de l’ISS.
Photo : Samantha Cristoforetti et Matthias Maurer, actuellement dans l’ISS, durant un vol parabolique zéroG (crédit: ESA)
Deux missions 100% privées sont prévues dans l’ISS en 2022 avec Axiom Space. Au commandement des vaisseaux Crew Dragon, deux anciens astronautes de la NASA : Michael López-Alegría et Peggy Whitson.
On en reparlera sur le blog !
Logo mission : crédit Axiom Space
Le premier vol du cargo Dream Chaser développé par Sierra Nevada Corp. pourrait commencer à effectuer ses missions de fret vers la Station spatiale internationale en 2022.
C’est le troisième engin sélectionné par la NASA pour le ravitaillement de l’ISS. Il a pris du retard…
Photo : Sierra Nevada.
Le cargo japonais de ravitaillement de l’ISS de nouvelle génération, le HTV-X, devrait faire sa première mission en 2022. Il aura des capacités accrues par rapport à l’HTV.
La Chine devrait continuer l’installation des prochains modules de sa grande station spatiale : Wentian et Mengtian.
Deux nouveaux cargos Tianzhou et deux vaisseaux Shenzhou avec de nouveaux équipages pour des missions longues sont également prévus de s’amarrer à la CSS en 2022.
Illustration de la CSS complète avec les 2 modules additionnels (crédit CAST)
Le premier vol du vaisseau habitable indien pour la mission spatiale indienne Gaganyaan est prévu pour la seconde moitié de 2022, avec si tout se passe bien, une deuxième mission sans équipage à la fin de 2022.
Cette deuxième mission emportera un robot-humain spatial nommé Vyommitra.
Après des vols en 2021, les vols suborbitaux du NewShepard de Blue Origin rentreront-ils dans une certaine routine ? Je parie que oui. Par contre, pour l’avion spatial SpaceShipTwo de Virgin Galactic, rien n’est moins sûr car après un premier vol « touristique », l’avion est en « maintenance prolongée » et beaucoup doutent de la fiabilité de l’engin.
Enfin plein de nouveaux lanceurs ?
2021 était l’annonce de l’entrée de nombreux nouveaux lanceurs orbitaux, mais finalement, seuls LauncherOne de Virgin et Astra ont réussi à faire un vol orbital avec succès [(re) lire Ma rétrospective espace 2021].
2022, on devrait enfin voir le très attendu SLS qui embarquera le vaisseau Orion sans équipage mais aussi des cubesats en passagers secondaires. Article à venir !
Illustration du lanceur SLS (Space Launch System) avec le logo de la mission Artemis-1 (crédit NASA)
Côté américain, ULA devrait effectuer le lancement inaugural de son lanceur Vulcan si les moteurs fournis par Blue Origin sont au rendez-vous. Rien n’est moins sûr par contre pour la New Glenn, le premier lanceur orbital de Blue Origin.
Après l’échec du vol inaugural en septembre de Firefly Alpha, il y aura sans nul doute au moins une tentative en 2022.
ABLS Space Systems et son lanceur léger RS-1 devrait aussi faire son entrée en 2022. Relativity Space avec Terran-1 ont annoncé leur intention de faire leur premier vol.
Image : illustration de Vulcan (crédit ULA)
Côté Arianespace, ce sera une année très chargée avec le vol inaugural de Vega-C, une version améliorée du lanceur léger Vega, plus puissante et plus flexible, annoncé au 2e trimestre 2022 et le très attendu premier vol d’Ariane 6 au 2e semestre.
Image : illustration deVega6C sous son portique (crédit ESA SPace Transportation)
Annoncée pour 2021, la Long March 6A (une variante de la Cz-6 avec 4 boosters) devrait effectuer son vol inaugural en 2022. La Long March 8 devrait faire son retour après un seul vol en 2020. Certains annoncent le décollage du lanceur Zhongke-1A de l’Académie des Sciences Chinoise (CAS).
On attend le retour de l’Hyperbola-1 (ou 2 ?) de Ispace qui a connu 2 échecs en janvier et août 2021. D’autres entreprises privées chinoises seront peut-être également présentes en 2022 au rendez-vous avec la Zhuque-2 de LandSpace, Jielong-1 de Chinarocket ou l’OS-M1 de OneSpace.
Les lanceurs nouvelle génération de la Chine – hors compagnies privées (crédit Daniel Marin)
Après un vol inaugural raté de son nouveau lanceur Nuri (ou KSLV-2), la Corée du Sud retentera-t-elle un lancement en 2022 ?
La start-up allemande Rocket Factory Augsburg fera-t-elle une première tentative de lancement de son micro-lanceur RFA-One ?
Annoncé pour 2021, le Japon devrait enfin lancer sa H-III en remplacement de la H-2B et l’Inde peut-être sa SSLV (Small Satellite Launch Vehicle).
Illustration de la H3 (crédit JAXA)
Des lancements, et encore des lancements
La barre des 100 lancements annuels devrait une nouvelle fois être dépassée en 2022.
La Chine qui est repassée première nation en nombre de lancements en 2021 vise 40 missions a minima avec ses lanceurs institutionnels Long March, dont au moins 4 lancements pour la construction de sa nouvelle station spatiale.
SpaceX, champion des opérateurs privés depuis plusieurs années, devrait continuer sur sa lancée avec les lancements institutionnels pour l’ISS et les lancements de sa constellation Starlink. Il devrait y avoir plusieurs vols de la Falcon Heavy. Mais d’autres missions attendent l’entreprise : des missions lunaires [voir plus haut]
Après les travaux sur Starbase, le vol à basse altitude du Starship SN15, on attend le premier vol orbital de Starship avant l’été.
Rocket Lab, l’entreprise américaine qui lance à ce jour depuis la Nouvelle-Zélande va-t-elle faire enfin décoller son Electron depuis son nouveau pas de tir situé à Wallops en Virginie aux Etats-Unis ? L’entreprise vise également la réutilisation du premier étage de son lanceur après plusieurs récupérations réussies en 2021, bien qu’il ne s’agisse jusqu’à présent de récupération après chute sous parachute et non récupération par hélicoptère.
Côté russe, il y aura les ravitaillements de l’ISS en cargo Progress ou vaisseau Soyouz, mais aussi les lancements OneWeb. Peut-être Luna 25 et sans nul doute des satellites gouvernementaux.
Évidemment, il manque des événements, des missions, des lancements majeurs, etc…
J’espère en 2022 vous offrir des articles de fond et pour l’actualité spatiale mensuelle, je suis en train de réfléchir à un nouveau format, peut-être à découvrir prochainement sur Rêves d’espace+ ?
Le résumé de la NASA pour 2022 :
A bientôt et abonnez-vous au blog !
Sources diverses : agences spatiales, opérateurs, Twitter (comptes reconnus)
NB : en cas de nouvel échec, ce serait le début de la fin pour Boeing !…
NB : s’agissant des Russes, à noter que la composition des équipages des Soyouz MS-21, 22, 23 et 24 change sans arrêt !
Même les Romains y perdent leur latin.
NB : après le groupe 23 de la NASA, connu le 6 décembre 2021 (10 nouveaux astronautes seulement – ou 12 avec les deux Emiriens), on devrait connaître à la fin 2022 la composition du nouveau groupe de l’ESA (de 2 à 4 seulement… sur plus de 22 000 candidats !) alors que l’on ne connaît toujours pas celles des derniers groupes indien et chinois.
Ping : Rétrospective 2022 d’une activité spatiale riche – Rêves d'Espace