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Actualités spatiales

Juice : les déploiements des antennes et mâts sont terminés

Après son lancement réussi le 14 avril, la sonde Juice en route pour Jupiter et ses lunes glacées, doit passer de sa “configuration de lancement” à sa “configuration de vol nominal”. Cette phase, appelée recette en vol, dure plusieurs mois et commence par le déploiement de tous les équipements qui étaient repliés lors du décollage pour rentrer dans l’espace confiné de la coiffe du lanceur.

Ainsi, au cours des dernières semaines, les mâts et les antennes ont été déployés avec plus ou moins de difficultés.

Le déploiement des mâts et des antennes était crucial car ils abritent tout ou partie des 10 instruments qui feront de la télédétection, des meures in situ et de la géophysique.

Article mis à jour le 12/06 avec l’ajout de MAJIS.

Des caméras pour surveiller

Deux caméras de surveillance JM (Juice Monitoring) ont été installées sur Juice pour surveiller les opérations de déploiement en complément des télémétries des instruments déployés qui sont reçues par les opérateurs du centre de mission de l’ESOC (European Satellites Operation Centre).

Ces 2 caméras ont des champs de vue différents. Elles ont pris les premiers selfies de Juice dans l’espace.

Localisation des caméras de surveillance JMC1 et JMC2 (crédit ESA, CC BY-SA 3.0 IGO)

Les images fournies sont de résolution 1024 x 1024 pixels en noir et blanc ou en couleurs.

RIME décoincée

L’antenne Radar for Ice Moons Exploration (RIME) n’a pas réussi a être déployée totalement au premier essai. RIME est considérée comme critique pour la mission car son but est de cartographier sous les croûtes glacées des lunes Europe, Ganymède, et Callisto.

Lors de la première tentative d’extension de l’antenne repliée, seuls les premiers segments de chaque moitié ont été déployés.

L’antenne RIME coincée mais en mouvement de Juice est photographiée par la caméra de surveillance de Juice. Cette animation montre les mouvements du radar sur cinq photos prises du 17 au 21 avril. Quatre segments de l’antenne RIME sont visibles ici, pliés les uns sur les autres. Cette pile d’éléments d’antenne est la moitié de l’antenne complète, l’autre moitié repliée de l’autre côté. L’autre moitié n’avait pas encore commencé le déploiement. Le petit point mobile en haut à droite de l’animation est, en fait, la Lune, à une distance d’environ 1 million puis 2 millions de km (crédit ESA/Juice/JMC, CC BY-SA 3.0 IGO)

Le processus de déploiement RIME est comme le dépliage des segments d’une règle de pliage. Les équipes du centre de contrôle de la mission de l’ESA à Darmstadt, en Allemagne, activent un à un les mécanismes qui maintiennent les deux moitiés de l’antenne stables pendant le lancement et doivent être libérés avant le déploiement de libération, ce qui fait que la pile des segments de RIME monte progressivement vers le haut. Dans l’ordre, les images de l’animation ci-dessus montrent : avant de lancer la séquence de déverrouillage, après le déblocage du mécanisme de verrouillage, après le déploiement du premier segment, après la tentative de déploiement des deuxième et troisième segments, après le déploiement du mât du magnétomètre. Chacune de ces étapes montre un changement de position de l’antenne RIME. Pour l’échelle, cette partie du RIME se déplace d’environ 5 cm de la première à la dernière image. Dans les deux premières images, RIME se déplace lorsque le système de verrouillage libéré. Dans la 3e image de la séquence, le segment supérieur semble disparaître, tournant de 180°, car le déploiement s’est correctement déroulé jusque là. La 4e image de la séquence montre le moment où les équipes ont tenté de déployer les 2e et 3e segments, qui seraient retenus par le support de montage de l’autre côté de l’antenne, et hors du champ de vue.

Pendant plus de 3 semaines, les équipes de l’ESA, avec l’aide d’Airbus Space, maître d’œuvre de la sonde, ont effectué des opérations sur la sonde pour la “secouer” afin de débloquer le mécanisme qui était en quelque sorte grippé. Le changement d’orientation de la sonde a également réchauffé les mécanismes qui bloquaient RIME. Le déclenchement d’un actionneur non explosif (NEA, Non-Explosive Actuator) a créé en complément un petit choc qui a libéré le tout.

RIME l’antenne de 16 mètres de long a finalement pu être déployée en totalité le 12 mai.

Séquence de déploiement final de RIME (crédit ESA/Juice/JMC, CC BY-SA 3.0 IGO)
Séquence d’image montrant RIME se déployant complètement le 12/05/2023 (crédit ESA/Juice/JMC, CC BY-SA 3.0 IGO)
Ce graphique montre le choc mécanique délivré par le déclenchement de l’actionneur “NEA 6 Release” dans le support de montage. L’oscillation amortissante résultante indique que l’antenne est libérée puis oscille d’avant en arrière avant de se stabiliser en position verrouillée étendue (crédit ESA, CC BY-SA 3.0 IGO)

RPWI, J-MAG, RADEM et GALA déployés et les premières données

Fin mai, les équipes scientifiques avaient allumé les instruments RPWI, J-MAG, RADEM et GALA et effectué quelques mesures.

Le mât de près de 11 mètres de long, supportant l’instrument J-MAG et RPWI a été déployé très tôt après le lancement, le 21 avril, alors que JUICE était à environ 1,7 million de km de la Terre.

2 des capteurs du magnétomètre J-MAG ont enregistré l’amplitude du champ magnétique avant et après déploiement :

Les télémétries de J-MAG montrent le moment du déploiement lui-même. Le tracé montre l’amplitude du champ magnétique de deux capteurs, comme indiqué par les lignes rouge et turquoise, avant (ligne plate) et pendant le déploiement (lignes de courbe). Les deux capteurs sont montés sur le segment extérieur du mât et séparés d’environ 3 m. Les étiquettes OBS et IBS indiquent les données des capteurs outboard (OBS) et inboard (IBS), OBS est monté près de l’extrémité du mât. Le côté gauche du graphe montre la trace avant le déploiement de la flèche ; les capteurs sont contre le côté de la sonde et OBS est situé à proximité de deux moteurs qui sont assez magnétiques, expliquant la différence entre les mesures de champ magnétique des 2 senseurs. Les lignes de tracé changent à mesure que le déploiement du mât se produit, commençant juste après 14:29:38 UT et prenant environ deux secondes. Par la suite, les deux mesures de champ sont à un niveau similaire, tendent vers zéro et stables, ce qui indique que le mât est déployé complètement et que les deux capteurs mesurent le champ du vent solaire ambiant (crédit ESA/Juice/J-MAG Consortium)

Des mesures ont été par la suite effectuées par les 2 senseurs MAGOBS et MAGIBS et le troisième, MAGSCA (Sensitive and Accurate quantum sensor) situé à l’extrémité du mât. Le MAGSCA utilise l’effet Zeeman pour mesure sans erreur de calibration le champ magnétique ambiant. Il sert aussi à calibrer les 2 autres senseurs pour des mesures en plusieurs points du champ magnétique.

Ce diagramme représente la toute première détection du signal d’interférence quantique pour mesurer les champs magnétiques dans le capteur MAGSCA sur Juice. Il montre le champ magnétique le long de l’axe optique SCA pour les trois capteurs (les champs IBS et OBS sont projetés sur cet axe). Le champ OBS et SCA est déplacé par rapport à IBS pour faciliter la visualisation. On peut voir dans le schéma que les trois capteurs J-MAG suivent les mêmes variations dans le champ magnétique du vent solaire, confirmant les bonnes performances des trois capteurs (crédit ESA/Juice/J-MAG Consortium)

Pour RPWI (Radio & Plasma Wave Investigation), les quatre sondes Langmuir (LP-PWI), de 3 mètres de long, et les trois antennes du Radio Wave Instrument (RWI) de 2,5 mètres de long, ont été déployées avec succès, soit 7 des 10 senseurs de la suite d’instruments qui mesurera les changements dans le champ magnétique, des ondes radio et des plasmas autour de Jupiter.

Séquence d’images d’une des 2 caméras de surveillance Juice, montrant le déploiement de la 4e sonde Langmuir (crédit ESA/Juice/JMC, CC BY-SA 3.0 IGO)

RPWI a même fourni ses premières données, associées à celle du Search-Coil Magnetometer (SCM) déployé avec le spectromètre J-MAG.

Première image pour JANUS

La caméra optique JANUS (Jovis, Amorum ac Natorum Undique Scrutator) a été allumée pour la première fois lorsque la sonde était à environ 8 millions de kilomètres de la Terre pour faire des images de test.

Une fois JUICE arrivée près de Jupiter, JANUS prendra des images en 13 couleurs différentes du violet à l’infrarouge.

Séquence d’images de sept acquisitions réalisées par l’instrument JANUS à bord de Juice couvrant une zone de ciel mesurant 1,3 x 1,7 degré de ciel. L’image au centre est eta Cyg (la douzième étoile dans l’ordre de luminosité dans la constellation Cygnus). De nombreuses autres étoiles s’allument à mesure que le temps d’intégration passe d’environ 2 à 200 millisecondes. Le champ d’étoiles a été sélectionné pour éviter une demande de pointage complexe à Juice, impliquant des gradients thermiques sur l’instrument, tout en permettant à JANUS d’observer des étoiles de luminosité et de type spectral différents, pour vérifier la qualité optique, la distorsion et la réponse spectrale (crédit ESA/Juice/JANUS consortium, CC BY-SA 3.0 IGO)

MAJIS se réveille

Ajout du 12/06/2022

Parmi les instruments de télédétection à bord de JUICE, le spectromètre d’imagerie MAJIS (Moons And Jupiter Imaging Spectrometer) opérant dans le visible et près de l’infrarouge (0,5-5,5 μm) a également été activé et testé avec succès en orbite : les deux canaux se sont avérés très bien fonctionner.

Selon le communiqué de l’Institut National d’Astrophysique Italienne (INAF), le miroir et l’obturateur de numérisation MAJIS ont fonctionné parfaitement.
Les observations de ses sources d’étalonnage interne confirment que les performances de l’instrument sont alignées avec les mesures avant le vol.

Image en niveaux de gris : haut = image d’étalonnage avant le vol, bas = mise en service en vol (crédit INAF).
Signal des 2 images (calibration au sol / en vol)

MAJIS va étudier la composition de surface et l’exosphère des lunes glacées et caractérisera la composition et la dynamique de l’atmosphère de Jupiter.

Et ensuite ?

Les essais sur les différents instruments scientifiques vont durer jusqu’à mi-juillet environ.

JUICE poursuit par ailleurs son long chemin vers Jupiter mais reviendra vers la Terre en août 2024 pour une première assistance gravitationnelle [on en reparlera !].

Source principale : site ESA

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