Une neuvième planète dans notre Système Solaire ?
Depuis le 24 Août 2006 où Pluton a été reléguée au rang de planète naine par l’UAI (l’Union Astronomique Internationale), notre Système Solaire ne compte plus que huit planètes… mais peut-être plus pour longtemps !
Depuis de nombreuses années, les astronomes sont à la recherche d’une hypothétique neuvième planète, parfois appelée Planète X. Leurs recherches ont permis la découverte de nombreux objets trans-neptuniens – c’est-à-dire dont l’orbite se situe au-delà de l’orbite de Neptune – comme Sedna en 2003 ou Eris en 2006. Les objets actuellement identifiés sont cependant de petite taille, et ne peuvent donc pas prétendre au qualificatif de « planète » : ce sont des planètes naines.
L’existence d’une planète de grande taille au-delà de l’orbite de Neptune n’est donc pour l’instant pas démontrée, mais de nombreux indices semblent indiquer la présence d’une planète massive et lointaine.
Une neuvième planète : pourquoi ?
Deux hypothèses principales ont amené les astronomes à supposer l’existence d’une neuvième planète massive.
Tout d’abord, en étudiant l’orbite de quelques objets trans-neptuniens, des équipes du Carnegie Institution of Science à Pasadena en Californie et de l’observatoire Gemini à Hawaï ont pu observer que certains d’entre eux possèdent des similarités dans leurs orbites qui ne peuvent pas être dues au hasard. En effet, notre Système Solaire existe depuis 4 milliards d’années, les orbites de ces objets devraient donc avoir été perturbées au fil du temps par l’influence des planètes géantes que nous connaissons bien – Jupiter, Saturne, Uranus et Neptune. S’ils possèdent des caractéristiques similaires, c’est parce qu’une autre planète, massive et plus proche que les géantes gazeuses, a une forte influence sur eux et les oblige à conserver des orbites régulières.
A partir de calculs théoriques et de simulations numériques, l’existence d’une neuvième planète a pu être testée. Ainsi, une planète d’environ 10 masses terrestres, dont l’orbite se situerait entre 400 et 1500 unités astronomiques du Soleil (1 unité astronomique = la distance Terre-Soleil, soit 150 millions de kilomètres) permettrait d’expliquer les similitudes d’orbites des objets trans-neptuniens.
Une autre étude, menée par Michael Brown et Konstantin Batygin, tous les deux chercheurs à Caltech (California Institute of Technology, également à Pasadena), est venue étayer l’hypothèse d’une neuvième planète. Pour comprendre leurs travaux, il faut revenir aux origines du système solaire. Ce dernier s’est formé à partir d’un vaste nuage de gaz et de poussière : tous les objets du Système Solaire (le Soleil lui-même, les planètes, les astéroïdes, etc.) en sont issus, et ont donc gardé des caractéristiques communes dans leur mouvement : toutes les planètes tournent autour du Soleil dans le même plan et dans le même sens par exemple. Cependant, l’axe de rotation du Soleil sur lui-même n’est pas aligné avec le plan de rotation des planètes autour du Soleil, ce qui n’est pas explicable sans une intervention extérieure.
L’existence d’une neuvième planète permettrait d’expliquer ce décalage : cette planète, très massive et avec une orbite très vaste, aurait eu pour effet d’incliner le plan de l’orbite des planètes, sans modifier la rotation du Soleil. De notre point de vue, c’est donc le Soleil qui semble décalé par rapport à l’orbite des planètes.
Où faut-il chercher ?
Si beaucoup d’astronomes sont maintenant convaincus de l’existence de cette neuvième planète, il reste encore à en apporter la preuve expérimentale, c’est-à-dire à l’observer. Les informations dont les chercheurs disposent ne sont pas assez précises pour savoir exactement où pointer un télescope pour la détecter.
Des chercheurs français de l’Observatoire de Paris et de l’Observatoire de la Côte d’Azur à Nice ont cependant réussi à établir des contraintes supplémentaires sur la position de cette planète. Pour cela, ils se sont appuyés sur la mesure de l’orbite de Saturne. En effet, la sonde Cassini de l’Agence Spatiale Européenne est en orbite autour de Saturne depuis Juillet 2004, et l’orbite de Saturne est donc connue avec une très grande précision : moins de 100 mètres d’incertitude, pour un objet situé à plus d’un milliard de kilomètres de nous ! Agnès Fienga et Jean Laskar ont donc eu l’idée de vérifier si les irrégularités de l’orbite de Saturne ne pouvaient pas être expliquées par la neuvième planète prédite par les chercheurs américains. Et ça marche ! Ils ont également pu restreindre les zones dans lesquelles la neuvième planète devrait se trouver actuellement pour pouvoir expliquer les perturbations de l’orbite de Saturne.
Et maintenant ?
Même si les zones d’observation ont été réduites, cette hypothétique neuvième planète reste très difficile à observer : il s’agit d’une planète très lointaine, donc peu brillante, et qui bouge très lentement, il faut donc des observations sur plusieurs années afin de s’assurer qu’elle a bien été détectée.
Les astronomes ont envisagé d’utiliser les données du télescope spatial Gaia, cependant il est possible que cette planète soit de luminosité trop faible et ait un mouvement trop lent pour avoir été identifiée par Gaia comme un objet du Système Solaire : elle pourrait donc avoir été identifiée comme une nouvelle étoile, alors que c’est n’en pas une… La planète aurait également pu induire un effet de microlentille gravitationnelle : en passant entre une étoile en cours d’observation et le satellite, les rayons lumineux émis par l’étoile ont pu être déviés par la planète. Cependant, là encore les effets risquent d’être trop faibles pour avoir été détectés par Gaia.
Les chercheurs veulent donc utiliser le télescope Subaru situé à Hawaï, qui a l’avantage d’avoir un large champ de vue et un grand miroir pour capter beaucoup de lumière. Ils espèrent pouvoir détecter cette neuvième planète d’ici 5 ans…
Affaire à suivre !
Article écrit par Clara Vergès, étudiante en Master 2 d’astrophysique à l’Université Paul Sabatier Toulouse III, et co-organisatrice de plusieurs SpaceUp en France
Félicitations, Clara, et bonne fête à Agnès !