La sonde européenne Hera survole Mars et sa lune Deimos
La sonde Hera de l’Agence Spatiale Européenne va survoler à partir d’octobre 2026 l’astéroïde double 65803 Didymos, dont la petite lune Dimorphos a été impactée par la sonde DART de la NASA en septembre 2022. Lancée en octobre 2024, la sonde a effectué ce 12 mars un survol de la planète Mars pour bénéficier de l’assistance gravitationnelle. L’occasion d’utiliser une partie de ses instruments scientifiques sur la lune Deimos.
En s’approchant à seulement 5 000 km de Mars à la vitesse de 32 400 km/h, la gravité de la planète a déplacé la trajectoire de la sonde. Cette manœuvre a réduit le temps de trajet de Hera de plusieurs mois et a permis d’économiser une quantité importante de carburant.

Trois des instruments de la sonde ont été activés lors du survol : AFC, TIRI et Hyperscout-H :
- AFC, Asteroid Framing Camera, pour la fourniture d’images de l’astéroïde sur plusieurs longueurs d’onde à l’aide de 2 caméras identiques avec un détecteur bidimensionnel.
- TIRI, Thermal Infra Red Imager, une contribution de l’agence spatiale japonaise, la JAXA, hérité de l’imageur TIR sur Hayabusa-2, pour des images thermiques (thermographie) pour l’identification de la composition du matériau de surface de la cible.
- Hyperscout-H, un imageur hyperspectral observant 45 bandes spectrales visibles et proche infrarouge, pour l’étude géologique et compositionnelle de l’astéroïde cible.
L’imageur japonais TIRI a observé Mars à une distance d’environ 40 000 km.

La région Arabia Terra est visible. Actuellement, c’est le début de l’été dans l’hémisphère nord de Mars. Hellas Planitia, le plus grand cratère du système solaire, est vu comme une région froide. Le pôle nord n’est pas visible car les calottes polaires sont constituées d’eau et de glace de dioxyde de carbone ; elles sont blanches et reflètent bien la lumière du soleil, ce qui permet de les garder « au frais », et donc le pôle nord est en dessous du seuil de détection de TIRI.
Hera est aussi passée à seulement 1 000 km de distance de la face cachée de la lune Deimos depuis la surface martienne.

Les images en infrarouge révèlent Deimos plus brillante que Mars. Cela signifie que la surface de Deimos sans air est plus chaude que la surface de Mars. Le matériau recouvrant la surface de Deimos a une faible réflectivité et est d’un noir absolu. Cela lui permet de bien absorber la lumière du soleil et de devenir plus chaude. En revanche, la surface de Mars est très réfléchissante et son atmosphère transporte la chaleur du côté chaud de la journée vers le côté nocturne plus frais. C’est pourquoi il y a une grande différence de température entre Mars et Deimos.
Deimos orbite à environ 23 500 km de la surface de Mars et est verrouillé par les marées, de sorte que ce côté de la lune est rarement vu.

Sur l’image prise par l’instrument Hypescout-H, Mars apparaît en bleu clair car l’instrument observe dans une gamme de couleurs au-delà des limites de l’œil humain, dans 25 bandes spectrales visibles et proche infrarouge. La région Terra Sabaea, proche de l’équateur martien, est très brillante. On distingue bien le cratère Huygens de 450 km de diamètre en bas à droite de Terra Sabaea et le cratère Schiaparelli de 460 km de diamètre à sa gauche. Le bassin Hellas en bas à droite est l’un des plus grands cratères d’impact connus du Système Solaire avec un diamètre de 2 300 km et une profondeur de plus de 7 km.

La lune martienne Deimos apparaît sombre, sur fond de planète Mars plus brillante, dans cette image monochromatique de la caméra AFC en lumière visible. On retrouve en haut de l’image la brillante région de Terra Sabaea et le cratère Huygens à sa droite.
Les résultats scientifiques du survol rapproché de Deimos devraient aider à la planification opérationnelle de la mission MMX, une collaboration entre la JAXA, la NASA, le CNES, le Centre aérien allemand (DLR) et l’ESA, qui s’envolera en 2026 pour collecter des données détaillées des deux lunes martiennes, et qui doit faire atterrir le rover franco-allemand Idefix sur Phobos pour collecter un échantillon et le renvoyer sur Terre pour analyse [article à venir en 2026 !].
Après une correction de trajectoire en février 2026, Hera devrait se mettre sur orbite de l’astéroïde Didymos de 780 mètres ainsi que de sa lune Dimorphos de 151 mètres de diamètre en octobre 2026. À ce moment-là, Hera et Didymos seront à 195 millions de km de la Terre. Hera devrait nous aider à mieux comprendre la formation des astéroïdes binaires qui constituent environ 15% des astéroïdes connus à ce jour [détails de la mission].
Mise à jour 21/03/2025
Lors de ce survol, l’entreprise GMV a également pu tester son système autonome de navigation et de contrôle de guidage (GNC) de pointe. L’algorithme de traitement d’image “Feature Tracking” aidera Hera à naviguer près des astéroïdes cibles. Il analysera les caractéristiques visuelles des astéroïdes lors des phases critiques de la mission et fournira des données en temps réel à l’ordinateur de bord de la sonde. Ce système permet à HERA d’adapter sa trajectoire pour les manœuvres complexes, de maintenir automatiquement l’astéroïde dans le champ visuel, et de calculer en temps réel la position relative par triangulation optique.
Pour suivre la trajectoire de la mission Hera : https://whereis.space/hera/
Sources principales de l’article : site ESA
Image de couverture : Mars et Deimos par HERA, crédit ESA/JAXA
