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Varda Space effectue la première démonstration d’une usine privée dans l’espace

L’entreprise américaine Varda Space vient de réaliser une première : la première fabrication privée de médicaments dans l’espace. C’est la première fois qu’une fabrication est délocalisée en dehors d’une station spatiale.

Le « laboratoire orbital » de Varda Space peu de temps avant le lancement (crédit Varda Space)

Depuis plusieurs décennies, des recherches s’effectuent dans les stations spatiales sur les propriétés des matériaux et des composés chimiques en apesanteur.
En 2019, le géant pharmaceutique Merck a publié qu’une expérience sur la Station Spatiale Internationale avait démontré que certaines particules chimiques d’un produit pharmaceutique se comportent différemment lorsqu’elles sont libérées de la gravité. Voyant comment son médicament contre le cancer avait cristallisé différemment en microgravité, Merck a modifié son processus de fabrication sur Terre pour produire une version plus stable, avec un mode d’administration plus simple et pouvant être stockée sur de longues durées.

Créée fin 2020, Varda Space propose à ses clients des vols en microgravité de longue durée pour fabriquer dans l’espace des médicaments, des câbles à fibre optique ou des semi-conducteurs qui auraient des propriétés améliorées plutôt que fabriqués sur Terre.

Une capsule « usine orbitale »

Varda Sapce prévoit d’utiliser des robots pour mélanger, chauffer et refroidir des composés chimiques adaptés au développement de médicaments, qui seront ensuite convertis sous forme solide et retournés sur Terre, où ils espèrent qu’ils serviront de base pour fabriquer des lots de nouveaux produits pharmaceutiques de taille industrielle dans des usines traditionnelles. Parmi les produits susceptibles d’être ainsi fabriqués figurent de nouvelles thérapies contre le cancer, ainsi que des traitements contre le diabète et la douleur chronique.

Cette « usine orbitale » est basée sur une capsule qui permet le retour sur Terre des matériaux fabriqués sur orbite.

La première capsule de Varda Space, W1, après son atterrissage (crédit John Krauss)

Premier vol de démonstration

La première capsule, Winnebago-1 (ou W1) a été lancée le 12 juin 2023 à bord de la mission Transporter-8 sur Falcon 9.

En bas à gauche, W1 prêt au décollage (crédit SpaceX)

La capsule d’environ 90 kg et d’environ 1 m de diamètre, a été fabriquée par Varda Space. Le centre Ames de la NASA a fabriqué le matériau de protection du bouclier thermique de la capsule, le C-PICA (Conformal Phenolic Impregnated Carbon Ablator).

La capsule est installée sur un module de service, ou bus, Photon, construit par Rocket Lab. Photon fourni l’énergie, les communications, un contrôle d’attitude et d’autres opérations essentielle aux opérations en orbite. L’ensemble fait environ 300kg au lancement.

La capsule Varda en intégration sur le module bus Photon de Rocket ab (crédit Varda Space)

L’objectif principal du premier vol du laboratoire orbital de Varda est de s’assurer que ses machines robotiques et sa technologie chimique fonctionnent comme prévu sur orbite, et que la capsule peut survivre à la rentrée dans l’atmosphère terrestre et atterrir via un parachute.

Le 30 juin 2023, Varda Space annonçait la réussite de la première cristallisation du Ritonavir en orbite, afin d’obtenir une version du médicament plus stable.

De nombreux médicaments peuvent cristalliser lorsqu’ils sont stockés, ce qui les rend inutilisables pour l’homme. Par exemple, ce problème a forcé l’arrêt des ventes de la forme de pilule du Ritonavir, un médicament anti-VIH, à la fin des années 1990, après des années de recherche et des centaines de millions de dollars d’investissement.

La mission ne devait durer qu’un seul mois sur orbite mais a finalement duré 8 mois

Pour effectuer les opérations de rentrée et d’atterrissage, Varda devait obtenir une licence de « conducteur de véhicule » du Bureau du transport spatial commercial de la FAA (Federal Aviation Administration) par rapport à de règlements fédéraux qui assurent la sécurité des vols spatiaux, des zones survolées et de l’espace aérien. Cette autorisation a tardé.

Après 8 mois sur orbite, Varda a finalement reçu l’autorisation de rentrée sur Terre de la FAA.

Extrait du dossier provisoire de la FAA sur la trajectoire de rentrée de la capsule de Varda Space

Le 21 février, le module Photon a exécuté une série de manœuvres et une désorbitation qui ont placé le laboratoire miniature sur la trajectoire de rentrée appropriée. Après séparation de Photon, qui a finit désintégré dans l’atmosphère terrestre, la capsule a volé à des vitesses hypersoniques (~ Mach 25) et a atterrit sous parachute dans le désert de l’Utah, sur une base de l’Air Force, l’Utah Test and Training Range (UTTR) comme initialement prévu.

La capsule juste après l’atterrissage (crédit John Krauss)

C’est la première fois qu’une entreprise commerciale a posé un engin spatial orbital sur le sol américain.

La vidéo de la rentrée depuis la caméra embarquée :

La capsule a été envoyée ensuite dans les installations de Varda à Los Angeles pour analyses, et les flacons de Ritonavir ont été expédiés à Improved Pharma, une société de recherche pour une caractérisation d’après vol. Varda va partager toutes les données collectées dans le cadre de la mission avec l’Air Force et la NASA, conformément aux accords existants avec ces agences.

Transport de la capsule après l’atterrissage (crédit John Krauss)

La mission est aussi une belle réussite pour Rocket Lab qui a géré pendant plusieurs mois les opérations du satellite Photon, renommé depuis fin février en Pioneer pour cette application. Varda Space a déjà commandé 2 autres modules pour de futures missions.

Rocket Lab a annoncé le 27/02/24 les nouveaux noms de sa série de satellites Photon : Explorer pour les missions d’exploration, Pioneer conçu pour de grandes charges utiles et avec la capacité de rentrée atmosphérique, Lightning pour des missions longue durée (>12 ans) en orbite basse. En savoir plus : https://www.rocketlabusa.com/space-systems/spacecraft/)

Face aux soucis d’autorisations de retour sur le sol américain, Varda Space a déjà passé un accord avec un opérateur privé en Australie, Southern Launch. La deuxième mission de Varda Space qui devrait avoir lieu mi-2024 pourrait ainsi atterrir en Australie, sur la base d’essai de Koonibba.

Il reste à Varda de pérenniser son usine orbitale et de démontrer la plue-value de fabrication en orbite de médicaments utiles et pouvant ensuite être produits en masse dans des usines sur Terre.

D’autres entreprises travaillent à des usines spatiales : par exemple Space Forge, basée au Royaume-Uni, travaille sur ses propres satellites de fabrication orbitale avec une capacité de retour. Malheureusement, ils ont perdu leur premier satellite de démonstration, un cubesat 3U, ForgeStar 0, lors de l’échec de Virgin Orbit début 2023.

Nous verrons bien dans les années à venir si cette première démonstration d’usine orbitale fera des émules ou non.

Sources principales : site Varda Space et article Bloomberg.

Photos de couverture : la capsule après atterrissage (Crédit Jhn Krauss) et vue sur la Terre depuis la capsule (crédit Varda Space)

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Une réflexion sur “Varda Space effectue la première démonstration d’une usine privée dans l’espace

  • IRENE BOSSU

    Bonjour IDariane;
    Merci pour cet article passionnant.
    Vous écrivez « C’est la première fois qu’une fabrication est délocalisée en dehors d’une station spatiale. »
    Ne vouliez-vous pas dire « c’est la première fois qu’une fabrication de medicament est localisée dans un station spatiale ?
    Merci
    Irène

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