Rêves d'Espace

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ISS, CSS & vols habités en orbite basse

Il y a 10 ans, le premier ATV pour l’ISS

Après le module Columbus dont on vient de fêter les 10 ans, l’Agence Spatiale Européenne a participé à la Station Spatiale Internationale avec un cargo de ravitaillement automatique : l’ATV.

Le véhicule de transfert automatique ATV est le premier engin spatial de réapprovisionnement entièrement automatique de son genre (credit ESA/D.Ducros)

L’ATV était constitué de 3 « morceaux » principaux :

  • le Module de Service et le Module Avionique, qui comprennent les systèmes de propulsion, d’énergie électrique, des ordinateurs, des communications et de l’avionique
  • Le Module de Fret ou « Integrated Cargo Carrier » (ICC), qui représente 60% du volume total de l’ATV, avec une partie pressurisée pour le fret « sec » (matériel scientifique, nourriture, habillement de rechange pour les astronautes, matériel de rechange, …) et une partie non pressurisée pour la cargaison liquide pour l’ISS (eau, carburant, …)
  • Les 4 panneaux solaires qui, une fois déployés en vol, ont une envergure de 22,3 mètres, pour fournir l’énergie électrique pour les batteries de 4 800 Watts en moyenne.
Schéma de l’ATV (credit ESA)

Jules Verne, le pionnier

Le premier Automated Transfer Vehicle est lancé le 9 mars 2008 à bord d’une fusée Ariane 5. Dix jours après son lancement, le 3 avril 2008, le premier ATV a parfaitement manœuvré pour s’arrimer automatiquement à l’ISS.

Le Jules Verne, en l’honneur du célèbre écrivain de « De la Terre à la Lune » entre autres, est le premier de 5 modèles qui s’amarreront à l’ISS entre 2008 et 2014, à peu près tous les 17 mois.

Le premier ATV, le Jules Verne, en approche de la Station Spatiale Internationale en mars 2008 (credit ESA/NASA)

Le Jules Verne utilise pour la première fois la navigation par satellites via le système GPS. Il ne s’est pas amarré directement à l’ISS car l’ESA a dû démontrer auparavant aux partenaires russes et américains la capacité de l’ATV à faire des manœuvres d’évitement, plusieurs tours de la Station, et des tests sur des systèmes particuliers pour éviter tout risque pour l’équipage à bord et pour la Station elle-même.

Toutes les opérations nécessaires à l’amarrage de l’ATV dans des conditions de sécurité maximum pour l’ISS ont été menées depuis le Centre de Contrôle de l’ATV au CNES à Toulouse, en coopération avec les centres de contrôle de la NASA à Houston et de Roscosmos à Moscou.

La salle de contrôle de l’ATV, l’ATV-CC, au CNES à Toulouse (photo personnelle)

Six mois après son arrimage à l’ISS, le premier ATV « Jules Verne » s’est détaché le 5 septembre 2008, embarquant avec lui les poubelles de la Station. Il effectuera une désintégration contrôlée lors de sa rentrée dans l’atmosphère terrestre, le 29 septembre 2008.

Images fixes d’une caméra de télévision haute définition sur l’un des avions observant la rentrée atmosphérique de l’ATV Jules Verne le 29 septembre 2008 (credit ESA)

Un cargo de ravitaillement aux multiples facettes

L’ATV était tout d’abord un cargo de ravitaillement : il apportait à l’ISS des marchandises comme de l’eau propre ou de la nourriture, des expériences et des objets personnels pour l’équipage de l’ISS. A chaque fois, un peu plus de 6 tonnes de fret. Au total, les ATV ont transporté jusqu’en 2015 plus de 31 tonnes de fret vers l’ISS.

Infographie 2018 d’Airbus pour les 10 ans de l’ATV

Mais à la différence de la plupart des cargos qui approvisionnent l’ISS, l’ATV avait plusieurs autres missions :

  • l’ATV amenait de l’oxygène à l’ISS nécessaire au renouvellement de l’air respiré par les astronautes pour éviter les cumuls de dioxyde de carbone. Le transfert d’oxygène entre l’ATV et l’ISS permettait aussi d’augmenter la pression au sein de l’ISS, qui subit des petites pertes lors des sorties extra-véhiculaires des astronautes.
  • l’ATV avec le carburant à son bord (3 100kg pour l’ATV5) a servi aux « reboosts » de la Station à plusieurs reprises : en allumant ses moteurs pendant quelques minutes, l’ATV relevait ainsi l’altitude de l’ISS de quelques centaines de mètres. Ce type de rehaussement permettait aux vaisseaux Soyouz de rejoindre la Station Spatiale seulement 6 heures après leur décollage depuis Baïkonour en 4 orbites autour de la Terre au lieu des 32 orbites et près de 2 jours de vol.
Vue d’artiste de l’allumage des moteurs de l’ATV pour reboost de l’ISS à une orbite plus élevée. (Crédit: ESA)
  • L’ATV a servi de « station essence » à l’ISS. Une fois le carburant transféré de l’ATV à l’ISS, la Station peut alors l’utiliser pour son contrôle d’altitude (l’ISS a tendance à descendre naturellement, attirée par la Terre, et pour changer d’altitude en fonction des cargos qui y arrivent) ou ses changements d’orientation. Désormais, seuls les cargos Progress exécutent cette tâche.
Le système de refuelling entre l’ATV et l’ISS. (Crédits : NASA / ESA)

Orion le successeur

Les technologies développées sur l’ATV par l’ESA, le maître d’oeuvre Airbus Defence and Space et ses partenaires, dont Thales Alenia Space, ont réussi à convaincre la NASA à une participation de l’Europe au programme ORION à travers le module de service ESM, European Service Module.

Situé directement sous le module d’équipage Orion, le module de service ESM apportera la capacité de propulsion pour le transfert orbital, le contrôle d’attitude et d’altitude. Il servira également à produire l’électricité grâce à ses panneaux solaires, à fournir le contrôle thermique, l’eau, l’oxygène et l’azote pour les astronautes jusqu’à leur retour sur Terre, jusqu’au moment où il se séparera du module de l’équipage.

Schéma du module Orion (credit NASA)

L’ESM est un module cylindrique d’un diamètre de 4,5 mètres et d’une longueur totale – moteur principal exclu – de 2,7 mètres. Il est équipé de quatre panneaux solaires semblables à ceux de l’ATV avec une envergure de 19 mètres.

Sa masse sèche est de 3,5 tonnes et il peut transporter 8,6 tonnes d’ergols qui alimenteront un moteur principal et 32 moteurs-fusées qui permettront d’effectuer des manœuvres orbitales et de contrôler l’attitude. Là encore, c’est l’expérience acquise avec les ATV, qui ont utilisé avec succès leurs moteurs-fusées pour permettre également à l’ISS d’éviter les débris spatiaux, qui est mise à contribution.

En 2019 / 2020, Orion effectuera une mission baptisée Exploration Mission-1, un vol inhabité à plus de 64 000 km de la Lune, destiné à valider les performances de la capsule. La première mission habitée, Exploration Mission-2, devrait être lancée en 2023, avec quatre astronautes à bord d’Orion.

La première mission pour Orion et le module de service européen ESM enverra le vaisseau spatial au-delà de la Lune et vice versa. Cette mission d’exploration 1 ne comportera pas d’équipage mais sera contrôlée à partir du sol. Le vaisseau spatial entrera en orbite basse avant que l’étage supérieur de la fusée ne s’allume pour le rentrer dans une orbite translunaire. Le vaisseau spatial effectuera un survol de la Lune, utilisant la gravité lunaire pour gagner en vitesse et se propulser à 70 000 km au-delà de la Lune, près d’un demi-million de kilomètres de la Terre, plus loin qu’aucun humain n’a jamais voyagé. Sur son chemin de retour, Orion fera un autre survol de la Lune avant de retourner sur Terre. Le voyage total prendra environ 20 jours, se terminant par une chute dans l’Océan Pacifique sans le module de service européen qui se séparera et brûlera inoffensivement dans l’atmosphère. La deuxième mission d’exploration aura un plan de vol similaire, mais avec quatre astronautes. (Credit Airbus)

L’ATV, une belle histoire personnelle

Personnellement l’ATV restera un excellent souvenir. Grâce à lui, j’ai pu rencontrer des passionnés de spatial comme moi lors de l’un de mes premiers « tweetup » organisé par l’ESA et le CNES pour l’amarrage de l’ATV3 Edoardo Amaldi à l’ISS. J’ai pu visiter à plusieurs occasions l’ATV-CC au CNES à Toulouse. J’ai notamment pu y assister à l’amarrage en direct de l’ATV 4 en juin 2013 [lire Le Docking de l’ATV à l’ISS : des femmes et des hommes aux commandes] et au décollage de l’ATV-5 en juillet 2014.

J’ai pu également voir l’ATV2 Johannes Kepler, à Kourou en juin 2010, avant le couplage du module de service et du module cargo, au début de sa préparation de son lancement qui a eu lieu le 17 février 2011.

ATV-2 Kepler au Centre Spatial Guyanais en juillet 2010

ATV-2 Kepler au Centre Spatial Guyanais en juillet 2010

ATV-2 Kepler au Centre Spatial Guyanais en juillet 2010

Pour compléter, tous les articles sur l’ATV

A lire aussi : Jules Verne a dix ans : le premier cargo ATV a fait des « petits »

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2 réflexions sur “Il y a 10 ans, le premier ATV pour l’ISS

  • Michel Clarisse

    NB : à noter que les trois astronautes ayant voyagé (à l’insu de leur plein gré) le plus loin de la petite planète bleue furent ceux d’Apollo-13, à savoir Lovell, Swigert et Haise. Leur éloignement maximum fut de 400 171 km.

    NB : pour mémoire, ATV-1 = « Jules Verne » ; ATV-2 = « Johannes Kepler » ; ATV-3 = « Edoardo Amaldi » ;
    ATV-4 = « Albert Einstein » ; ATV-5 = « Georges Lemaître ».

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