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La Chine spatialeLune

Sauvetage des satellites chinois DRO A et B : l’enjeu des communications lunaires

Le 13 mars 2024, une Long March 2C subit un échec : l’étage supérieur ne réussit pas à mettre sur orbite d’injection vers la Lune 2 petits satellites, DRO-A et B de l’Académie chinoise des sciences (CAS). On croyait ces 2 satellites perdus mais finalement, ils auraient atteint leur orbite cible.

Logo de la mission CZ-2 montrant l’objectif lunaire des satellites

DRO-A et B sont des satellites de démonstration technologique de communications. Ils devaient rejoindre une orbite distante rétrograde autour de la Lune pour tester la faisabilité des communications avec un satellite en orbite basse terrestre DRO-L, lancé en février 2024.

Cette orbite DRO (Distant Retrograde Orbit) est une orbite stable autour de la Lune, caractérisée par son interaction avec deux points de Lagrange (L1 et L2) du système Terre-Lune. Dans une DRO, l’engin spatial orbite dans la direction opposée à l’orbite de la lune autour de sa planète, et passe au-dessus des points de Lagrange plutôt que de rester proche de la surface de la lune. L’intérêt des DRO est leur stabilité (les orbites qui commencent près d’un point restent près de ce point au fil du temps) et leur efficacité énergétique (peu de carburant est nécessaire pour maintenir l’orbite pendant de longues périodes). Les missions Chang’e5 et le vaisseau Orion d’Artemis 1 ont effectué des orbites distantes rétrogrades.

Le vaisseau Orion d’Artemis 1 a utilisé en partie une DRO emmenant le vaisseau à 64 000 km de la surface de la Lune au plus loin (crédit NASA).

L’objectif des 2 satellites chinois DRO A & B était de tester la technologie de navigation relative de haute précision avec 3 satellites, 2 en orbite lunaire et 1 en orbite terrestre, en vue d’établir une infrastructure de navigation et de communication lunaire pérenne pour les missions chinoises sur le sol lunaire à venir.

Diagramme schématique de la navigation différentielle à faisceau unique, exprimé en système de coordonnées rotatives Terre-Lune (crédit Journal d’exploration de l’espace lointain, 2023).

Après l’échec du lancement de la Long March, les 2 satellites sont restés sur une orbite basse terrestre (LEO). L’US Space Force a ensuite pu observer que les 2 satellites élevaient leur orbite jusqu’à une orbite terrestre hautement elliptique, très probablement grâce à leur propulsion.

Après 167 jours de manœuvres, dont 5 manœuvres orbitales, 5 corrections de trajectoires et 3 assistances gravitationnelles, les 2 satellites sont parvenus à entrer en DRO le 27 août 2024 selon des publications sur les réseaux sociaux chinois le 26 janvier dernier.

Photo sur le réseau social Weibo montrant les différentes phases pour atteindre l’orbite DRO (via Andrew Jones).

La durée de vie des 2 satellites sera sans doute fortement impactée car ils ont utilisé une grande quantité de carburants pour entrer en orbite elliptique terrestre puis pour les manœuvres orbitales.

Grâce à ce sauvetage de la mission DRO A et B, la Chine démontre une nouvelle fois ses capacités à gérer et à surmonter les anomalies en orbite, une compétence essentielle pour les missions spatiales complexes, notamment dans l’espace lointain.

L’enjeu des communications lunaires

La Chine est la seule nation à avoir testé à ce jour les communications avec des satellites relais depuis l’orbite lunaire, avec les satellites Queqiao, pour les missions Chang’e4 et Chang’e6 sur la face cachée de la Lune, et qui serviront pour les missions à venir Chang’e7 et Chang’e8 prévues en 2026 et 2028.

Le lancement du satellite Queqiao-2 comprenait également 2 cubesats, Tiandu-1 et 2, expérimentaux pour tester et vérifier les technologies permettant d’alimenter une constellation de navcom à grande échelle.

Des chercheurs chinois ont d’ailleurs proposé que la Chine intègre ses satellites lunaires Queqiao avec ceux existants de la constellation de satellites de télécommunications Tianlian en orbite géostationnaire (actuellement 8 satellites ont été lancés) , qui desservent notamment, entre autres, la station spatiale chinoise. La justification de la proposition est d’améliorer considérablement le temps et la zone de couverture de la surface lunaire pour les prochaines missions lunaire habitées de la Chine. Cela permettrait également une redondance si et quand la Chine est confrontée à des problèmes de disponibilité des stations au sol de la part de ses partenaires à travers le monde. D’autres études sont en cours pour avoir une constellation progressive de plus de 30 satellites qui fourniraient une navigation de haute précision ainsi que communications à large bande passante.

Concept en trois étapes de développement d’une constellation cislunaire de navigation et de communications proposé par des chercheurs chinois (crédit : SCMP)

L’Agence Spatiale Européenne a créé le programme Moonlight avec 4 satellites pour la navigation et un pour les communications. La NASA a son projet Lunar Communications Relay and Navigation Systems (LCRNS).

L’enjeu des relais de télécommunications lunaires ne fait que commencer.

Image d’illustration générée par IA, non représentative des DRO A et B (je n’ai pas trouvé d’images les représentant).

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