Rêves d'Espace

Un site sur l'actualité spatiale : les vols habités, les lancements, l'exploration de l'espace, les grandes missions actuelles et futures

Mars

Le rover Curiosity a découvert des molécules organiques d’une taille sans précédent sur Mars

Le rover Curiosity arpente le sol martien depuis 2012 et a parcouru un peu moins de 35 km. Avec ses mini-laboratoires embarqués, il analyse les roches et les sédiments rencontrés, à la recherche d’indices sur l’habitabilité de Mars. Dans une publication scientifique émise fin mars, on apprend que les molécules organiques les plus longues ont été découvertes à ce jour.

Cette illustration montre les molécules organiques à longue chaîne décane, undécane et dodécane. Ce sont les plus grosses molécules organiques découvertes sur Mars à ce jour. Ils ont été détectés dans un échantillon de roche forée appelé “Cumberland” qui a été analysé par le laboratoire d’analyse d’échantillons de Mars à l’intérieur du ventre du rover Curiosity de la NASA. Le rover, dont le selfie se trouve sur le côté droit de l’image, explore le cratère Gale depuis 2012. Une image du trou de forage de Cumberland est faiblement visible à l’arrière-plan des chaînes moléculaires (crédit : NASA/Dan Gallagher)

La suite d’instruments SAM (Sample Analysis at Mars) à bord du rover avait identifié jusqu’à présent plusieurs classes de composés organiques chlorés et de soufre dans les roches sédimentaires du cratère Gale, avec des structures chimiques allant jusqu’à six atomes de carbone. Dans cette nouvelle étude, menée par l’astrochimiste française Caroline Freissinet du LATMOS (Laboratoire Atmosphères et Observations Spatiales) du CNRS, les plus grands composés organiques de la planète rouge à ce jour ont été identifiés, fondamentaux dans la structure des membranes cellulaires.

Pour la première fois, trois alcanes à longue chaîne, décane (C₁₀H₂₂), undécane (C₁₁H₂₄) et dodécane (C₁₂H₂₆), ont été détectés dans un échantillon de mudstone (une roche sédimentaire argileuse) foré dans la formation Sheepbed du site appelé Cumberland. Ces molécules ont été identifiées à des niveaux de l’ordre de dizaines de picomoles, soit des concentrations de l’ordre de 40 à 50 parties par milliard.

Dodécane est, à ce jour, la molécule organique la plus lourde (12 atomes de carbone) identifiée de façon certaine à la surface martienne.

Le rover Curiosity de la NASA a percé le site « Cumberland », au cours du 279e jour martien, ou Sol, le 19 mai 2013 et a collecté un échantillon en poudre de matériau à l’intérieur de la roche. Curiosity a utilisé la caméra Mars Hand Lens Imager (MAHLI) sur le bras du rover pour capturer cette vue du trou de Cumberland. Le diamètre du trou est d’environ 15,24 mm. La profondeur du trou est d’environ 66 mm (crédit : NASA/JPL-Caltech/MSSS).

SAM est un gros laboratoire de chimie analytique embarqué dans Curiosity, pesant près de 40 kg, soit la moitié de l’ensemble des instruments du rover. Il permet d’analyser l’environnement du rover au niveau moléculaire. Il a été développé sous la responsabilité du LATMOS et sous la maîtrise d’ouvrage du CNES. Il a été développé en collaboration avec le NASA Goddard Space Flight Center et le NASA Jet Propulsion Laboratory (JPL).

SAM permet de chauffer les échantillons prélevés par le rover jusqu’à plus de 850 °C, et d’analyser finement la nature chimique des gaz produits avec les 3 instruments complémentaires qu’il contient. Cela permet de fournir des informations sur la nature des minéraux et composés organiques présents dans les échantillons analysés. SAM a également la capacité d’analyser la composition de l’atmosphère pour comprendre le climat présent et passé de la planète.

Le Sample Analysis at Mars (SAM) est un ensemble puissant de trois instruments à bord du Mars Science Laboratory (MSL) ou rover Curiosity qui travaillent ensemble pour étudier la chimie de la surface de Mars et l’atmosphère au sein du cratère Gale. (Crédit : NASA / GSFC)

Des expériences de laboratoire ont permis de confirmer que ces alcanes pouvaient provenir de la décarboxylation thermique d’acides carboxyliques à longue chaîne (présents initialement dans la roche). L’origine précise de ces alcanes reste toutefois incertaine : ils pourraient être d’origine abiotique (réactions chimiques non liées à la vie, comme le processus Fischer-Tropsch) ou biotique (résultant d’une activité biologique passée).

La découverte de constituants essentiels d’acides gras (notamment présents dans les graisses animales ainsi que les graisses et huiles végétales) pourrait confirmer que, dans un passé lointain, Mars abritait des formes de vie dans certains environnements hydrothermaux. La présence de minéraux argileux (smectite) et de sulfates dans la roche a probablement favorisé la préservation de ces molécules organiques sur des milliards d’années.

La détection d’alcanes à longue chaîne, qui sont des molécules stables et potentiellement issues de processus biologiques, renforce l’intérêt de la recherche de biosignatures sur Mars. C’est l’objet de la mission suivante, Perseverance, avec sa collecte d’échantillons de roches martiennes qui pourraient revenir sur Terre pour des analyses plus poussées. Cette dernière partie fait l’objet de la mission Mars Sample Return, mais qui est actuellement compromise par les choix budgétaires en cours de l’Administration Trump pour la NASA. C’est aussi l’objet de la mission ExoMars de l’ESA dont le lancement est prévu en 2028 si tout va bien.

À suivre…

Sources principales : la publication et le communiqué du CNRS

Publicités

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.