Kosmos-482, la capsule soviétique qui va tomber sur la Terre le 10 mai
Article initialement publié le 9 mai et mis à jour le 10/05/25 à 18h00
Une capsule spatiale, Kosmos-482, en orbite terrestre depuis 53 ans va faire une rentrée dans l’atmosphère terrestre vers le 10 mai. Kosmos-482 est une capsule initialement destinée à atterrir sur la planète Vénus mais qui est restée en orbite terrestre depuis l’échec de son placement sur la bonne trajectoire par le lanceur.
Une sonde qui ne deviendra pas Venera
Dans les années 1960 et 70, l’institut de recherche spatiale IKI et la société Lavochkin ont développé une série de sondes pour l’exploration de Vénus. Les sondes n°670 et 671 ont été lancées à 4 jours d’intervalle. Lancée le 27 mars 1972, la sonde n°670 a été mise sur la trajectoire vers Vénus et est ainsi devenue officiellement Venera 8. Elle a atterri avec succès sur Vénus le 22 juillet 1972, survivant pendant 50 minutes à la surface et envoyant les premières données scientifiques de la surface de la planète [Venera 7 fut le premier atterrisseur vénusien mais n’envoya que la température de surface].

Lancée le 31 mars 1972 la sonde n° 671 n’a pas atteint la bonne trajectoire en raison d’une défaillance de l’étage supérieur de lanceur qui a allumé son moteur 125 secondes au lieu des 243 secondes nécessaires, laissant sa charge utile sur une orbite de 205 kilomètres sur 9 805 kilomètres avec une inclinaison de 52,22 degrés.
Les Soviétiques ont alors identifié la sonde sous la désignation Kosmos 482, le nom Kosmos étant utilisé comme nom de couverture générique pour toutes sortes de programmes militaires et civils, ainsi que pour masquer les échecs.
Jusqu’à cinq objets associés au lancement de Kosmos-482 ont été suivis en orbite par des radars occidentaux, dont 2 sont rentrés dans l’atmosphère en quelques jours. Puis d’autres dans les années suivantes. Mais au moins un objet est resté sur orbite plus longtemps et au fil des années, son orbite est devenue plus basse.
Un débris spatial potentiellement dangereux
Lorsque l’objet 1972-023 E a été catalogué pour la première fois en juillet 1972, il se trouvait sur une orbite inclinée de 210 x 9 710 kilomètres et 52,1 degrés. Au cours des 50 dernières années, l’altitude de l’apogée de cet objet a baissé de plus de 7 700 kilomètres et, au 1er mai 2022, l’objet se trouvait sur une orbite de 198 x 1957 kilomètres.
En 2022, un document soviétique est déclassifié et indique que la capsule d’atterrissage en forme d’œuf avait été délibérément séparée du module orbital.

Plusieurs spécialistes des rentrées atmosphériques comme Jonathan McDowell ou Marco Langbroek estiment que l’objet qui est en train de tomber vers la Terre est cette capsule.
Étant conçue pour traverser l’atmosphère de Vénus, supporter la forte pression atmosphérique de la planète et jusqu’à 300 G d’accélération, cette capsule d’environ 480 kg et d’un mètre de diamètre avec une coque en titane, survivra probablement à sa rentrée dans l’atmosphère terrestre.
Le système de parachute prévu pour le freinage de la capsule pour l’atterrissage ne fonctionnera probablement pas après plus de 50 ans dans l’espace.
Kosmos-482 va-t-il nous tomber sur la tête ?
Plusieurs réseaux de surveillance des débris spatiaux suivent Kosmos-482 afin d’estimer la localisation de sa rentrée atmosphérique et l’éventuel point d’impact dans le cas où la capsule survit.
C’est le cas notamment du réseau de surveillance de l’espace européen, l’EU SST et le bureau de gestion des débris spatiaux de l’agence spatiale européenne (ESA Space Debris Office).
Pour l’ESA, au 8 mai à 18h30 CEST, la rentrée atmosphérique est estimée au 10 mai à 8h16 UTC avec une incertitude de ±8,61 heures.

Pour l’EUSST, au 8 mai à 15h00 CEST, la fenêtre de rentrée estimée est au 10 mai à 6h47 UTC, avec une incertitude de ± 9 heures.

En raison de son inclinaison d’environ 51,95 degrés, l’objet peut rentrer dans une bande de latitude de ±52 degrés soit les latitudes respectives du Royaume-Uni et du sud de la Nouvelle-Zélande.

Remarque : les emplacements de rentrée possibles se troublent n’importe où le long des lignes jaunes et vertes. Le point de rentrée est considéré comme étant à une altitude de 80 km.
Pour Marco Langbroek du Delft Technical University et spécialiste du suivi des rentrées atmosphériques avec la station de suivi de Leiden aux Pays-Bas, la prévision actuelle de la rentrée est le 10 mai 2025 à 7h34 UTC ± 14,6 heures.

Si l’objet reste intact, la zone à risque est très petite, mais si la capsule se désintègre en plusieurs débris lors de la rentrée atmosphérique, la zone à risque devient plus grande.
La surface de la Terre étant composée à environ 70% d’eau, il y a de fortes chances que l’atterrissage se fasse quelque part dans un océan. Il reste toutefois 1 chance sur 1 000 que Kosmos-482 percute une personne, selon Jonathan McDowell.
Les prévisions seront mises à jour au fil des heures. Allez consulter le site de l’EUSST pour la mise à jour par exemple.
Mise à jour 10/05/25 18h00
La rentrée atmosphérique de Kosmos-482 a eu lieu ce 10 mai. Mais l’incertitude persiste sur l’heure exacte et surtout sa localisation.
Pour l’EU SST, l’objet Kosmos-482 s’est désintégré dans la dernière fenêtre de rentrée estimée à 06:04 UTC ±20 minutes.
Pour le bureau des Débris Spatiaux de l’ESA, comme la capsule n’a pas été repérée au-dessus de l’Allemagne lors du passage prévu de 07h32 UTC par le radar d’observation spatiale TIRA de l’institut allemand Fraunhofer FHR, il est fort probable que la rentrée ait eu lieu sur la trajectoire entre 06h04 UTC et 07h32 UTC. La dernière estimation était 06h16 UTC avec une incertitude de cette prédiction de +/- 0,36 heure.
Pour l’agence spatiale russe, Roscosmos, la rentrée de kosmos-482 a eu lieu à 6h24 UTC à 560 km à l’ouest de l’île de Middle Andaman, et elle est tombée dans l’océan Indien à l’ouest de Jakarta.
Aerospace Corp, une entreprise privée américaine, a pour sa part donné sa dernière prédiction à 6h12 UTC avec une marge de +/- 3 heures.
Le CSpOC (Combined Space Operations Center), centre de l’US Space Force qui suit les débris spatiaux, a annoncé une rentrée à 5h32 UTC +/-12 minutes mais compte tenu que l’ESA a eu un écho radar à 6h04 UTC, cela ne semble pas correct pour Marco Langbroek.
En résumé : personne ne sait encore où la capsule a pu rentrer. Et pour l’instant, il n’y a eu aucun rapport d’observations visuelles directes de la rentrée finale ou d’impact sur Terre.
Pourquoi autant d’incertitudes ?
En rentrant dans l’atmosphère terrestre, les particules freinent le débris spatial mais leur densité est différente selon l’altitude et connaît des fluctuations à cause du vent solaire et elles ne sont pas homogènes sur tout le globe. Les modèles de rentrée atmosphérique sont donc différents d’un organisme à l’autre.
Les débris en orbite basse (moins de 2 000 km) se déplacent à 7-8 km/s, avec des vitesses relatives pouvant atteindre 10 km/s lors de collisions. Cette vitesse extrême amplifie toute erreur de suivi : une incertitude de 1 seconde dans le temps de rentrée équivaut à une déviation de 7 à 8 km sur la trajectoire.
Sources : EUSST, RussianSpaceweb, site de Marco Langbroek, blog ESA.
Image de couverture générée via Perplexity

Une chance sur 1000 que la capsule percute une personne. D’où ça sort ça, c’est n’importe quoi ! A la fin d’un article qui me paraissait sérieux, ça la fout mal…
La source est indiquée : Jonathan McDowell, expert reconnu sur le sujet. Son article : https://planet4589.org/space/debris/notes/k482/k482.html