L’actualité spatiale du 27 mai au 2 juin : lancements russes et des nouvelles d’Hayabusa-2
Une semaine spatiale très russe pour changer, et des nouvelles de la sonde japonaise Hayabusa-2.
Une Soyouz foudroyée
Lundi 27 mai à 6h23 UTC, une fusée Soyouz 2.1b a décollé du Cosmodrome de Plesetsk.
Un satellite Glonass-M a été placé correctement sur orbite moyenne par l’étage supérieur Fregat. Il fait partie de la constellation russe de satellites de navigation Glonass. Actuellement, la constellation Glonass comprend 27 satellites, dont un satellite de la nouvelle génération Glonass-K qui subit actuellement des essais en vol et un satellite Glonass-M en réserve orbitale.
Quelques secondes après le décollage, la foudre a atteint le lanceur, sans dommage pour celui-ci, ni pour la charge utile.
Поздравляем командование Космических войск, боевой расчёт космодрома Плесецк, коллективы РКЦ "Прогресс" (Самара), НПО имени С.А.Лавочкина (Химки) и ИСС имени академика М.Ф.Решетнёва (Железногорск) с успешным запуском КА ГЛОНАСС!
Молния вам не помеха pic.twitter.com/1cmlZ4hD1g— РОГОЗИН (@Rogozin) May 27, 2019
Il s’agit du premier lancement d’une fusée du cosmodrome de Plesetsk en 2019. Depuis 2004, ce sont près de 37 lancements de Soyouz-2 avec les variantes 1a, 1b et 1v qui ont eu lieu à partir du cosmodrome du nord de la Russie.
Savez-vous que les fusées Soyouz « perdent » aussi des morceaux au-dessus de la Sibérie ? Le premier étage est largué au-dessus de cette zone :
Sortie spatiale russe à l’ISS
Mercredi 29 mai, 2 cosmonautes russes, Oleg Kononenko et Alexey Ovchinin, ont réalisé une sortie spatiale à la Station Spatiale Internationale qui a duré 6 heures et 1 minute.
En détails sur : ISS : une sortie spatiale russe très complète – VKD-46
Premier lancement de l’année pour Proton
Jeudi 30 mai, le lanceur russe Proton a décollé du Cosmodrome de Baïkonour à 17h42 UTC.
Environ 9 heures après le lancement, l’étage supérieur Briz-M s’est séparé du satellite Yamal-601 et l’a placé sur orbite de transfert géostationnaire.
Yamal-601 est un satellite de 5 700 kg, construit par Thales Alenia Space, pour le compte de Gazprom Space Systems, une filiale de PJSC Gazprom, qui exerce des activités spatiales dans le domaine de la création et de l’exploitation de systèmes d’espace de télécommunication et de géo-information dans l’intérêt premier du groupe Gazprom, premier exploitant ressources de pétrole et de gaz. Le satellite Yamal-601 devrait remplacer le satellite Yamal-202 en orbite à 49° de longitude Est et fournir des services de communication et de transmission de données fixes en bande C sur une grande partie de la Russie, ainsi que dans les pays de la Communauté des États indépendants et d’Europe., Moyen-Orient et Asie du Sud-Est. Avec une partie de la charge utile en bande Ka , il couvrira la partie la plus peuplée du territoire de la Russie (partie européenne de la Russie, y compris la région de Kaliningrad, l’Oural et la Sibérie occidentale) pour des services haut débit aux entreprises, aux administrations régionales, aux petites entreprises et aux particuliers.
Nouvelle approche de Ryugu pour Hayabusa-2 avant la collecte d’un nouvel échantillon ?
Les 29 et 30 mai, les équipes de la JAXA ont envoyé la sonde Hayabusa-2 se rapprocher de la surface de l’astéroïde Ryugu. Cette nouvelle phase de la mission s’est appelée PPTD-TM1A, pour Pinpoint Touchdown – Target Marker 1A [atterrissage précis – marqueur cible 1A]. Elle vient en plus de la phase PPTD-TM1 qui n’avait pas abouti entre le 14 et le 16 mai. Arrivé à environ 50 m de la surface, l’engin spatial a arrêté lui-même la descente pour sa propre sécurité car la mesure de distance au laser altimètre (LIDAR) n’avait pas pu être effectuée correctement.
La descente a commencé à 16h21 UTC depuis une altitude de 20 km, avec une vitesse de 40cm/s . A 23h26 UTC, la sonde se trouvait à moins d’1 kilomètre de la surface. Le cratère d’Urashima est nettement visible à droite et le cratère de Momotaro sur la gauche.
Le 30 mai à 1h59 UTC, Hayabusa-2 est à 35 mètres d’altitude. Son ombre est visible sur la surface de l’astéroïde (à gauche) :
L’engin spatial est descendu jusqu’à 10 mètres de la surface de Ryugu et a lâché un marqueur de cible.
Animation du lâcher d’un marqueur de cible par la sonde Hayabusa-2 le 30/05/2019 par la caméra ONC-W1 de 2h19 à 2h23 UTC (heure de bord) à une altitude comprise entre 10 et 40 m (credit JAXA) :
Une fois cette opération réalisée, la sonde est remontée à son altitude d’attente à 20 km de la surface de l’astéroïde.
L’objectif a été complètement atteint : un marqueur de cible a été déposé à un endroit précis, à proximité de la zone du cratère artificiel créé par l’impacteur SCI le 5 avril dernier (zone CO1 dans l’image ci-dessous). Désormais, la prochaine étape sera une collecte d’échantillon de la surface de Ryugu grâce à la « trompe » de la sonde [(re)lire la première collecte d’échantillon dans Hayabusa-2 : collecte d’échantillons réussie sur Ryugu].
En bref
Déjà la fin pour Stratolaunch ?
Selon Reuters, la société Stratolaunch Systems Corporation, qui a réussi à faire décoller le plus gros avion du monde, serait en train de cesser ses activités. La compagnie fondée par le cofondateur de Microsoft Paul Allen pourrait bien s’éteindre avec lui. Stratolaunch n’a toutefois rien confirmé.
Depuis le décès de Paul Allen le 15 octobre 2018, les activités de Stratolaunch sont compromises. Déjà, il y a quelques mois, la compagnie américaine née en 2011 a annoncé enterrer son programme de développement de lanceurs légers, lesquels devaient être larguées par l’avion-porteur. Cela ne laissait plus que la Pegasus XL de Northrop Grumman comme lanceur largable, capable de mettre 450 kg de charge utile en orbite basse. Or cette dernière n’a pas volé depuis fin 2016 à cause de son prix. Sûr mais cher, le lanceur avait surtout comme client la NASA. Depuis, RocketLab a débarqué et pris le leadership du marché des micro-lanceurs en imposant ses prix cassés à la façon de SpaceX. De plus, de nouvelles compagnies américaines sont sur le point de faire leur apparition : Vector, Firefly, Alpha, et enfin Virgin Orbit et son lanceur LauncherOne, lui aussi largable depuis un Boeing 747 modifié. Bref, en enterrant son programme de développement de lanceurs, Stratolaunch s’est retrouvé sans lanceur à porter, il n’y a plus de client pour la Pegasus XL.
La société a quand même réussi un coup de maître le 13 avril en faisant décoller son gigantesque avion-porteur, et un vol test avec une Pegasus était prévu en 2020. Selon Reuters, ce vol n’était qu’un hommage à Paul Allen et une démonstration de concept, à l’initiative de Jody Allen, sœur du millionnaire et dirigeante du trust Vulcan Inc. qui possède Stratolaunch. Depuis, l’équipe de Stratolaunch est passée de 77 à 21 employés. Privée de modèle économique à la hauteur du marché des micro-lanceurs en explosion, la société pourrait bien fermer et l’avion-porteur ne plus jamais voler.
Chang’e 4 : jour 6
Le 6ème jour a commencé pour le lander chinois et son rover Yutu-2 qui s’est réveillé lundi 27 mai à 18h16 UTC. Chang’e 4 s’est réveillé le lendemain à 10h00 UTC. Le rover a fonctionné pendant quelques jours avant de faire sa sieste habituelle du midi lunaire le 31 mai, date pour l’instant non-confirmée. Le rover devrait reprendre ses activités le 6 juin, aucune autre info sur la mission depuis le début du jour 6.
Omega : le test ne finit pas comme prévu
Omega est la nouvelle fusée lourde en développement proposée par Northrop Grumman, dont le tir inaugural est prévu en 2021. Le 30 mai, la fusée capable de mettre 10 tonnes de charge utile en orbite géostationnaire passait une étape clé de son développement avec un static fire, un test en conditions réelles de mise à feu du premier étage. La mise à feu a duré 122 secondes, temps prévu d’utilisation du premier étage lors d’un lancement. Ce test est nécessaire pour valider le design du premier étage de l’Omega.
Well that suffered a big problem! pic.twitter.com/KJvH8WXlLU
— Chris Bergin – NSF (@NASASpaceflight) May 30, 2019
Selon Northrop Grumman, le test s’est bien déroulé dans sa longueur sauf à la fin. En effet, à l’issue du test on pouvait voir la tuyère et le moteur en feu, une bonne partie de la tuyère avait fondu. Northrop va devoir revoir sa copie pour corriger ce problème, en espérant que le design du premier étage ne soit pas trop révisé en profondeur, ce qui coûterait beaucoup de temps au développement. Northrop Grumman espère s’introduire dans le marché des lanceurs lourds avec des prix bas. la compagnie a déjà fait des propositions à l’US Air Force et compte bien obtenir un contrat comme Blue Origin en a signé un pour booster le développement de la New Glenn.
La NASA choisit trois compagnies privées pour commencer son retour sur la Lune
Les trois premières missions d’avant-garde du programme Artemis seront robotiques. Les missions seront développées par trois compagnies américaines :
- Orbit Beyond : Z-01, lancement prévu en septembre 2020 par Falcon 9, le lander sera développé via la startup indienne TeamIndus, qui avait participé au Google Lunar XPrize.
- Astrobotics : lancement prévu en juillet 2021 par Falcon 9 ou Atlas V.
- Intuitive Machines : lancement prévu en 2021 par Falcon 9.
En tout, la NASA a débloqué 250 M$ pour financer les trois missions. [dossier Lune à venir !]
Fin officielle de Spektr-R
Le 30 mai 2019, la Commission d’État a officialisé la fin de la mission du radiotélescope spatial russe Spektr-R. Depuis début janvier, date où il n’était plus possible d’envoyer des télécommandes, les tentatives de reprendre contact avec le satellite sont restées infructueuses.
Le satellite Spektr-R a fonctionné 2,5 fois plus longtemps que la période prévue. Au cours de ses travaux, la communauté scientifique internationale a reçu une quantité importante de données qui vont continuer d’être exploitées pour mieux comprendre l’Univers.
Son remplaçant, Spektr-RG sera lancée à la fin du mois de juin 2019 [on en reparle dans le blog].
Joyeux anniversaire Baïkonour
Le 2 juin 2019 marque le 64e anniversaire du début de la construction du Cosmodrome de Baïkonour. Il n’a porté officiellement ce nom qu’après le lancement historique du premier homme dans l’espace, Youri Gagarine, en 1961. Depuis le cosmodrome de Baïkonour, une part importante des lancements est réalisée pour la mise sur orbite de missions à vocation scientifique ou commerciale, des missions interplanétaires ainsi que des cargos ou des vaisseaux pour la Station Spatiale Internationale.
NB : article écrit à 4 mains avec Daniel !
NB : le Cosmodrome de Baïkonour se situe en réalité à Tiouratam (ou Tyura Tam).
Bien entendu, dans les commémorations officielles, il ne fut pas du tout question – ou ça m’étonnerait – du fait que ce cosmodrome, tout comme d’autres installations, telles Kapustin Yar, Sary Shagan ou Semipalatinsk, fut construit par les déportés du GuLag (ou par des volontaires désignés d’office).
De même qu’en ce jour, dans l’Empire du Milieu, on n’évoque pas le « 35 mai »… (Tian’anmen Guangchang, ce qui peut se traduire par la Place de la Porte du Ciel installé).