55e anniversaire du premier vol habité de Youri Gagarine
12 avril 1961, le premier homme dans l’espace s’appelle Youri Gagarine
La fusée Vostok s’élance du Cosmodrome de Baikonour à 9h07 heure de Moscou avec à son bord, le vaisseau Vostok 1 et le premier homme dans l’espace, Youri Gagarine. Un vol d’un peu moins de 2 heures mais un vol historique !
616 secondes après le lancement, c’est le premier homme en orbite autour de la Terre. Il devance d’un mois le premier américain dans la course à l’espace de l’époque entre américains et soviétiques.
En vidéo (sélection d’images de l’époque) : https://youtu.be/OW0yGZjFXWU
Retour sur les derniers jours avant le premier vol habité
7 mars 1960, une vingtaine d’hommes sont sélectionnés parmi les pilotes de l’armée soviétique, dont Youri Gagarine et Alexei Leonov, le premier « piéton » de l’espace.
5 avril 1961, par des avions séparés pour des raisons de sécurité, les cosmonautes rescapés des sélections partent de Moscou pour Baïkonour afin de préparer le premier vol humain dans l’espace. A ce moment, aucun d’eux ne sait qui va être l’heureux élu, même si Titov et Gagarine semblent faire l’unanimité de leurs collègues. Dans une semaine, tout devrait être joué.
Jeudi 7 avril, les cosmonautes soviétiques sélectionnés pour le premier vol dans l’espace sont arrivés à Baïkonour, lieu secret pour les occidentaux, en territoire kazakhs de nos jours. Ils enfilent leurs scaphandres SK-1 et en tenue, testent pour la première fois le vaisseau Vostok 1 encore dans le hall d’assemblage.
Même si lors des conversations qu’ils ont eues individuellement avec Sergeï Korolev, le concepteur des fusées russes, certains savent déjà qu’ils ne seront pas du voyage, le sort n’est toujours pas jeté entre Titov et Gagarine.
Vendredi 8 avril, les responsables du programme spatial soviétique décident que le vol du premier homme dans l’espace n’effectuera qu’une unique orbite. Et cette orbite aura un périgée bas, assurant un retour naturel entre 2 et 7 jours. En cas de non allumage de la rétrofusée, le vaisseau rentrerait naturellement dans les couches denses de l’atmosphère en une semaine maximum. A cette fin, 10 jours de réserves de nourritures (+3) sont installés dans le vaisseau.
La Commission d’Etat s’est réunie pour désigner les pilotes. Youri Alexeïevitch Gagarine est désigné comme titulaire du vol, Guerman Titov sera sa doublure et Gregori Nelioubov, triplure si besoin.
Dans le bus qui emmènera Gagarine (1) sur le pas de tir dans 2 jours, Titov (2) sera également en tenue de vol, au cas où et Nelioubov (3) en tenue militaire. Exclu du groupe des cosmonautes pour indiscipline 2 ans plus tard, Neliobov n’acceptera pas son sort et mettra fin à ses jours en 1966.
La journée du 9 avril sera consacrée à l’entrainement dans le vaisseau Vostok 1 encore dans le bâtiment d’intégration.
Le dimanche 10 avril 1961, la Commission d’Etat soviétique se réunit une dernière fois pour autoriser le lancement du premier homme dans l’espace. Cette réunion est très solennelle et tous les acteurs du programme sont présents aux côtés des 3 cosmonautes. Le lancement est programmé pour le 12.
Lundi 11 avril 1961, à 5h du matin, les portes du bâtiment d’intégration s’ouvrent pour laisser sortir la Semiorka porteuse du premier vaisseau à transporter un homme dans l’espace : Vostok 1.
Dans la matinée, les cosmonautes (titulaire et doublures) rencontrent et saluent le personnel du pas de tir avant d’aller effectuer une ultime répétition du vol à bord du vaisseau tout en haut du lanceur. Le reste de la journée des cosmonautes sera consacrée à revoir le plan de vol, se relaxer et subir des examens médicaux.
Nuit du 11 au 12 avril 1961 : Gagarine et Titov dorment dans une cabane en bois, près de celle où tentera de dormir Korolev, à quelques kilomètres du pas de tir. La maisonnette deviendra un musée où chaque cosmonaute qui décolle du cosmodrome se rend avant son vol.
12 avril 1961 Gagarine et Titov sont réveillés à 5h30 par le Directeur de l’entrainement des cosmonautes, Karpov. Après un dernier examen medical (test des capteurs biométriques posés la veille) et un petit déjeuner, Titov et Gagarine enfilent leur scaphandre (Titov puis Gagarine pour limiter la transpiration) qui est testé (pressurisation et tests des liaisons.
Sur le casque, Victor Tigranovich a peint en lettres rouges – URSS – en russe (CCCP) – au cas où Gagarine ne tombe pas sur le territoire national.
A 6h30 Gagarine s’installe dans l’autobus avec sa doublure Titov en tenue. Direction le pas de tir. Là aussi, commence une tradition « spatiale » : tous les cosmonautes urinent sur le pneu arrière droit du bus comme Gagarine l’a fait ce 12 avril (les femmes en sont exemptées).
Le lanceur et le vaisseau sont prêts. Leurs taux de fiabilité sont faibles : 0,56 pour la Semiorka et 0,60 pour le vaisseau Vostok. 1 chance sur deux que l’un ou l’autre ne fonctionne pas !
6h50 Le bus arrive au pas de tir. Gagarine est accueilli par Korolev puis par celui qui va l’installer à bord : Oleg Ivanovski. Oleg n’est autre que celui qui avait accueilli en juillet 60, le groupe des cosmonautes pour leur présenter le Vostok, à peine 9 mois plus tôt.
H-1 heure – Gagarine s’installe à bord de son vaisseau. Oleg Ivanovski vérifie les attaches de Gagarine. Il lui indique de la tête l’enveloppe dans laquelle il y a le code permettant de débloquer le mode pilotage automatique. Mais ne peut s’empêcher de lui donner le code – 125 – permettant le passage en pilotage manuel. Gagarine sourit. Ce code ‘’secret’’ lui a déjà été donné par Korolev. Tout le monde souhaite le succès de la mission.
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Le vol dura 108 minutes. Au retour, Gagarine s’éjecte comme prévu et atterrit en parachute dans la campagne soviétique. Une paysanne qui le rencontre en scaphandre prend peur.
Gagarine devient un héros national mais malheureusement il décédera prématurément en 1968 dans un accident d’avion de chasse à l’entrainement.
Ce 12 avril 1961 devient un événement majeur de l’Histoire.
Le journal de 20h à la télévision française le 12 avril 1961 : https://www.ina.fr/video/CAF90018468
L’année Gagarine pour Roscosmos
« Levez la tête ! »
Voici ce qu’il y a derrière ce slogan selon Roscosmos(traduction approximative sans doute) :
« Nous sommes tous pressés… nombriliste … toujours plein de soucis … quand on résout un problème il y a en d’autres … Nous ne disposons pas de temps pour lever la tête et regarder ! Pourquoi ? Après tout, il semble qu’il n’y a rien d’intéressant plus haut. Cela mériterait peut être d’essayer ? Levez la tête !! Il y a beaucoup de chose auxquelles nous ne prêtons pas attention depuis longtemps … Vous voyez, les rayons du soleil font leur chemin à travers les arbres? Vous voyez, les étoiles brillent dans le ciel nocturne, les satellites, l’ISS …? L’espace est sans limite! … »
Mais aussi derrière cette expression, il y a l’interprétation figurative « Croyez en vous-même », …, « aller de l’avant », … , « Ne pas avoir peur du changement ». Le concept démontre également la portée des intérêts du spatial russe dans un avenir proche (orbite terrestre) et exprime le désir de faire revivre l’industrie spatiale en Russie, sur les réformes en cours et une nouvelle vision des objectifs des activités spatiales. »
NB : Youri Gagarine (en français), Yuri Gagarin (en anglais) ou Yuriy Gagarin (en russe).
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Le premier groupe de cosmonautes (TsPK-1, 1960) comprenait 20 pilotes dont 12 sont allés dans l’espace, à savoir, par ordre chronologique (selon l’orthographe russe) :
Yuriy A. Gagarin, Gherman S. Titov, Andriyan G. Nikolayev, Pavel R. Popovich, Valeriy F. Bykovskiy, Vladimir M. Komarov, Pavel I. Bel’yayev, Aleksey A. Leonov, Boris V. Volynov, Yevgeniy V. Khrunov, Georgiy S. Shonin et Viktor V. Gorbatko.
Les 8 autres sélectionnés étaient :
Ivan N. Anikeyev, Valentin V. Bondarenko, Valentin I. Filatyev, Anatoliy Ya. Kartashov, Grigoriy G. Nelyubov, Mars Z. Rafikov, Valentin S. Varlamov et Dmitriy A. Zaykin (qui fut la doublure de Bel’yayev pour Voskhod 1).
19 autres candidats furent présélectionnés.
Les 9 présélectionnés « 1er choix » étaient :
Nikolay I. Bessmertniy, Boris I. Bochkov, Georgiy A. Bravin, Grigoriy K. Inozemtsev, Valentin A. Karpov, Lev Z. Lisitz, Valentin P. Sviridov, Ivan M. Timokhin et Mikhail A. Yeremenko.
Les 10 présélectionnés « 2e choix » étaient :
Vladimir Baranov, Oleg I. Chizh, Igor Kapustin, Aleksey Lushin, Vladimir F. Nelepa, Oleg Razumov, Pyotr S. Safonov, Boris Sirota, Valentin P. Verichev et Vladimir A. Vyazovkin.
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A noter que, pendant longtemps, on a cru que Zaykin s’appelait Ivanov et que Kartashov s’appelait Maslennikov.
De même, parmi les femmes (groupe de 1962), on a longtemps cru qu’ Irina B. Solov’yeva s’appelait Umravlenya et que Tat’yana P. Morozitcheva (ou Morozycheva) s’appelait Torchillova.
Maintenant, il est fort possible que ce soient les noms de deux autres candidates.
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Pour le groupe TsPK-1 (1959-60), il y eut 3 461 candidats (en 1959) puis 347 puis 206 puis 154 puis 39 puis 29 (en février 60) puis 20 (en mars 60) au fur et à mesure des diverses épreuves de sélection.
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Le tout premier sélectionné ne fut pas Youri A. Gagarine mais Pavel R. Popovich, qui était alors le mari de la célébrissime Marina L. Popovich – ils ont divorcé – dont je pensais bien, à cette époque (en août 62, date du 1er vol de Pavel Popovich, elle était alors bien plus célèbre que lui…), qu’elle serait la première femme dans l’espace…
(à moins que ce ne fut l’américaine « Jerrie » Cobb qui était pressentie, parmi 12 autres candidates, pour voler sur une capsule Mercury, projet abandonné… les Américains s’en mordront les doigts… tout comme pour Alan B. Shepard qui aurait très bien pu faire un « saut de puce » quelques jours avant le vol orbital de Gagarine, la face du monde en aurait été changée).
Marina L. Popovich (ou Popovicha) fit effectivement partie des candidates « cosmonettes » en 1961-62 mais ne fut pas sélectionnée, on peut se demander pourquoi. Ils auraient pu voler tous deux ensemble… cela aurait été une autre grande première à mettre à l’actif des Soviétiques.
Toujours est-il que je la connaissais plus d’un an avant Valentina Tereshkova.
Elle fit partie des 26 candidates dont je connais les noms (1) mais pas des 5 sélectionnées (V. Tereshkova, V. Ponomaryeva, I. Solov’yeva, T. Kuznetsova et Zh.Yerkina).
(1) : Valentina I. Borzenkova, Valentina Daritcheva, Inga Yu. Ivanova, Svetlana Ivleva, Galina G. Korchuganova, Galina Korol’kova, Tat’yana D. Kuznetsova, Vera Kvasova, Natal’ya Maslova, Tat’yana P. Morozitcheva (alias Torchillova), Valentina L. Ponomaryeva, Marina L. Popovich, Natal’ya A. Prokhanova, Valentina M. Selivertsova, Marina Sokolova, Lyudmilla Solovova, Irina B. Solov’yeva (alias Umravlenya), Valentina V. Tereshkova, Svetlana A. Vlasova, Tat’yana N. Voinova, ? Yefremova, Lydia Yeremina, Zhanna D. Yerkina, Lidiya Ya. Zaitseva, Rosaliya M. Zanozina (Shikina) et Vera Zubova.
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S’agissant plus précisément de la mission Vostok 1, il y eut au départ 6 cosmonautes de présélectionnés, à savoir Gagarin, Popovich, Titov, Nikolayev, Kartashov et Varlamov (dans cet ordre).
Kartashov et Varlamov se sont tous deux blessés à l’entrainement (Kartashov dans la centrifugeuse et Varlamov en plongeant dans un lac gelé !…) ; ils furent remplacés respectivement par Nelyubov et Bykovskiy.
En conséquence, les 6 cosmonautes présélectionnés finalement pour cette mission historique furent Gagarin, Titov, Nelyubov, Popovich, Nikolayev et Bykovskiy (dans cet ordre).
Les deux « cap com » (capsule communicators) furent Popovich et Leonov.
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Ne pas oublier celui qui fut la première victime (officielle) de la conquête spatiale, le jeune Valentin V. Bondarenko, qui est mort le 23 mars 1961 dans le caisson hyperbare (chambre de pression), soit 20 jours seulement avant le vol historique de Gagarine.
Youri A. Gagarine avait été la « doublure » de Vladimir M. Komarov pour Soyuz 1 en avril 67.
Il s’est tué 11 mois plus tard à bord d’un vieux MiG-15 UTI en compagnie de Vladimir S. Seryogin (ou Seregin) qui était l’un des pilotes-instructeurs des cosmonautes, et notamment celui du premier groupe féminin (1962).
Parmi les autres pilotes-instructeurs, il y avait notamment Mark L. Gallay et Ivan M. Dzyuba (rappel).