Ce qui heurtera la Lune en mars n’est finalement pas une Falcon 9
Le 8 février, je relayais l’information sur l’impact à venir d’un étage supérieur de Falcon 9 sur la Lune dans cet article.
Bill Gray, le « découvreur » de cet évènement, est revenu ce 13 février sur l’identification du futur impacteur lunaire : ce n’est pas l’étage Falcon 9 précédemment annoncé. Il s’agirait de l’étage supérieur de la mission Chang’e5 T1.
Bill vient de reconnaître une erreur d’identification effectuée en 2015. L’objet identifié dans l’espace avait alors reçu un nom temporaire, WE0913A [voir article précédent].
Le 12 février, Bill a reçu un e-mail de Jon Giorgini du Jet Propulsion Laboratory (JPL) , s’enquérant de sa déclaration selon laquelle le satellite DSCOVR (et cet étage de Falcon 9) est passé près de la lune le 13 février 2015, deux jours après son lancement. Jon a souligné que le système Horizons du JPL servant aux éphémérides des objets du Système Solaire montrait que :
la trajectoire de DSCOVR n’allait pas particulièrement près de la Lune. Et donc qu’il serait un peu étrange que le deuxième étage passe à proximité de la Lune aussi, même si les 2 trajectoires étaient un peu éloignées.
En effet, il est d’usage que l’étage supérieur du lanceur s’écarte de la trajectoire de sa charge utile pour éviter de la perturber, mais elle reste toutefois « au voisinage », pas à des millions de kilomètres.
Du coup, Bill a effectué des recherches sur des missions pouvant expliquer l’objet passant près de la Lune en mars 2015. Le lancement qui répond à plusieurs critères est désormais celui d’une Long March 3C pour la mission Chang’e 5-T1 le 23 octobre 2014 à 18h00 UTC.
Bill ne sait pas exactement quand le booster de la Long March 3C serait passé à proximité de la Lune, il estime que cela doit être dans les 4 jours après le lancement. En parcourant l’orbite de WE0913A avant mars 2015, il voit un survol lunaire le 28 octobre 2014, qui correspondrait à cette estimation.
Bill a calculé que l’orbite avant le survol est une orbite de transfert lunaire « habituelle ». En supposant que le périgée était juste au-dessus de l’atmosphère (comme c’est généralement le cas), avec un décollage depuis une base en Chine, le périgée se produit environ une demi-heure après le décollage.
Bill de conclure :
En bref, cela ressemble exactement à ce qu’une mission lunaire chinoise devrait ressembler dans tous les détails.
En un sens, cela reste une preuve « circonstancielle ». Mais je considérerais cela comme une preuve assez convaincante. Je suis donc persuadé que l’objet sur le point de frapper la lune le 4 mars 2022 à 12h25 UTC est en fait l’étage de la fusée Chang’e 5-T1.
Cette erreur d’identification révèle surtout un problème dans la localisation l’identification et le suivi des objets de fabrication humaine au-delà de l’orbite terrestre. Donc soyons bienveillants auprès de Bill Gray et des nombreux astronomes qui essayent de surveiller l’espace lointain sur leurs heures de loisirs alors que les opérateurs de lancement ne surveillent plus ou presque plus leurs lanceurs une fois la mission principale effectuée.
L’impact sur la face cachée de la Lune le 4 mars vers 12 h 25 min 39 s UTC reste toujours d’actualité.
Image à la une : crédit H. Marchis