10 ans pour Columbus, le module européen de l’ISS
Il y a 10 ans, le module laboratoire Columbus fabriqué en Europe pour l’Agence Spatiale Européenne prenait son envol.
De l’idée de 1985 au décollage en 2008
En 1985, l’ESA approuve l’idée de participer au futur programme de station spatiale de la NASA, l’agence spatiale américaine, avec la construction de 3 modules, dont il ne restera au final qu’un seul. En octobre 1995, au Conseil ministériel de l’ESA qui se tient à Toulouse, l’Europe confirme sa participation à ce qui est devenu entre temps la Station Spatiale Internationale. Cette approbation a conduit à la signature du contrat de développement de Columbus, d’après le nom de Christophe Colomb, avec pour maître d’œuvre EADS-Astrium (ancienne Airbus Space) en mars 1996.
En mars 2003, l’ESA signe un contrat avec l’agence spatiale allemande, le DLR, pour développer le centre de contrôle Columbus au centre aérospatial allemand d’Oberpfaffenhofen, assurer la gestion du centre, coordonner et soutenir toutes les opérations en orbite du laboratoire Columbus pour le compte de l’ESA.
La construction de la structure mécanique de 4,5m de diamètre sur 6,9m de long et un peu plus de 10 tonnes à vide et 75 mètres cube de volume intérieur à vide a été réalisée par Alenia Aerospazio (désormais Thales Alenia Space) à Turin en Italie. L’assemblage final a été effectué à Brême en Allemagne chez EADS-Astrium (désormais Airbus Space).
Le lancement de Columbus était initialement prévu sur une Ariane 5 mais s’effectuera à bord d’une Shuttle. Prévu initialement pour la fin de 2004, la désintégration catastrophique de la navette Columbia le 1er février 2003 a finalement retardé le décollage de plus de trois ans. Le module quitte le sol européen le 26 mai 2006 à bord d’un avion Beluga pour le Kennedy Space Center aux Etats-Unis.
Le module va alors subir des tests pour s’assurer qu’il est étanche et prêt pour le vol.
Été 2006, le module européen Columbus en cours de déplacement sur un poste de travail dans une salle blanche au Centre spatial Kennedy en Floride, peu après son arrivée sur le site de lancement (Crédit: NASA)
Après un report en décembre 2007, le lancement a lieu finalement le 7 février 2008 à bord de la Navette Spatiale Atlantis. A son bord, deux européens : le Français Léopold Eyarts et l’Allemand Hans Schlegel.
Amarrage permanent à l’ISS
La Navette Atlantis rattrape la Station le 9 février.
Avant d’accoster à la Station Spatiale Internationale, l’astronaute Steve Frick, commandant de la mission STS-122, a piloté la navette Atlantis pour permettre à l’équipage de l’ISS d’inspecter la protection thermique de la Navette et prendre des photos selon les procédures en vigueur après l’accident de Columbia en février 2003. Une photo de la charge utile, le module Columbus, a pu être également prise :
À bord de la Station Spatiale Internationale, l’équipage de la Navette va retrouver le commandant de l’Expédition 16, Peggy Whitson, et les astronautes Daniel Tani et Yuri Malenchenko.
Le 11 février, le module Columbus est fixé à la Station grâce au bras robotique Canadarm2 de l’ISS. Walheim et Love, équipés de combinaison de sortie spatiale, avaient préalablement connecté un dispositif de capture à l’extérieur de Columbus encore dans la soute de la navette (Hans Schlegel devait faire l’EVA mais il a le mal de l’espace). C’est Léopold Eyharts qui a opéré le bras robotisé pour aligner Columbus avec le port du Node 2 Harmony de l’ISS. Il a ensuite manœuvré le module les derniers centimètres pour faire de Columbus une composante de recherche permanente de la Station Spatiale. « Le module européen Columbus fait maintenant partie de l’ISS« , a déclaré Léopold Eyharts après l’amarrage réussi du module.
Un laboratoire européen pour des expériences en impesanteur
Comme les laboratoire américain Destiny et le laboratoire japonais Kibo qui sera lancé quelques mois plus tard, Columbus est équipé d’installations de recherche flexibles dans les domaines de la science des matériaux, en physique des fluides et en sciences de la vie.
Les «racks», ressemblant à des unités de stockage dans les avions, sont des équipements très compacts pour la recherche dans diverses disciplines scientifiques. Chaque rack a la taille d’un réfrigérateur et peut accueillir des laboratoires autonomes et indépendants, équipés de systèmes d’alimentation et de refroidissement. Des liens vidéo et de données envoient les résultats aux chercheurs sur Terre. Sur la photo ci-dessus, de gauche à droite, les 4 premiers racks de Columbus au décollage, en configuration de lancement, l’European Drawer Rack, un support d’expérimentation flexible; les modules européens de physiologie pour des expériences axées sur le corps humain; Biolab pour les expériences en sciences de la vie; et le Fluid Science Lab pour l’étude des fluides en microgravité. D’autres racks sont venus s’ajouter au fil des années.
Grâce à ces installations, les chercheurs ont été en mesure de mener des recherches multidisciplinaires en microgravité au cours des 10 dernières années par l’intermédiaire des équipages de l’ISS. Columbus et sa suite d’équipements de recherche ont accueilli près de 1 800 expériences et généré d’innombrables articles scientifiques depuis 10 ans.
13 février 2008, l’astronaute de l’ESA, Hans Schlegel travaille à l’extérieur du module Columbus lors de la seconde EVA de la mission STS-122 (credit ESA via Airbus)
Walheim et Love ont réalisé une nouvelle sortie dans l’espace le 15 février sur Columbus. Les astronautes ont installé des expériences à l’extérieur du laboratoire.
EuTEF (European Technology Exposure Facility) et SOLAR (Solar Monitoring Observatory) sont alors installés. EuTEF comprend alors 9 expériences européennes dont des recherches sur le comportement des bactéries dans l’espace, plusieurs exemples de nouveaux matériaux qui seront testés, et un appareil pour mesurer les niveaux de radiation. Après une mission réussie de 1,5 an dans l’espace, la plateforme EuTEF est revenue sur Terre avec la mission STS-128 en septembre 2009.
SOLAR est un ensemble expérimental de l’ESA composé de trois instruments scientifiques, à savoir le SOVIM (Solar Variability et Irradiance Monitor), le SOLSPEC (Solar Spectral Irradiance Measurements) et le SolACES (Spectrophotomètres EUV / UV à étalonnage automatique). L’objectif global est de mesurer l’irradiance spectrale solaire avec une précision sans précédent. SOLAR devait fonctionner au plus 2 ans mais finalement a été mis hors service en septembre 2017.
13 astronautes à bord de Columbus
La Navette Atlantis quitte l’ISS le 18 février 2008, mais Léopold Eyharts reste à bord de la Station en remplacement de Daniel Tani. Il y restera 48 jours et mettre en éveil le laboratoire Columbus.
Depuis, et à ce jour, ce sont 12 autres astronautes européens qui ont travaillé dans le module Columbus, dont l’un 2 fois. Saurez-vous les nommer ?
Liens utiles :
- La page officielle de l’ESA sur Columbus
- A la découverte de Columbus laboratoire européen de l’espace sur le site de l’ESA
- La mission STS-122 sur le site de la NASA
Ces 13 astronautes européens sont : Léopold Eyharts, Hans Schlegel, Frank De Winne, A. Christer Fuglesang, Paolo Nespoli (2 fois), Roberto Vittori, André Kuipers, Luca Parmitano, Alexander Gerts, Samantha Cristoforetti (la seule femme), Andreas Mogensen, Timothy Peake et Thomas Pesquet (suivi de Paolo Nespoli pour ce qui fut son 3e vol spatial).
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Suite au retour sur le plancher des vaches, Salon de l’Agriculture oblige, de Soyuz MS-06 / ISS 53-54, il n’y a plus que trois « astro-cosmonautes » à bord de l’ISS, à savoir Shkaplerov, Tingle et Kanai.
Pour ce qui est de la durée des vols spatiaux, Misurkin est actuellement 44e (et 36e Russe ou autre ex-soviétique), Acaba 54e (et 8e Américain) et Vande Hei 114e (et 38e US).
Quant à leurs trois collègues, ils occupent actuellement les positions suivantes, de façon toute provisoire :
Skkaplerov 23e (et 20e Russe ou autre ex-soviétique), Tingle 156e (et 62e US) et Kanai 157e (19e « autre » et 7e Japonais). Ils remonteront bien vite dans ce classement.