Starship : encore des progrès notables lors du 4e vol test
Ce 6 juin, le quatrième vol test du lanceur géant de SpaceX, le Starship, a répondu aux attentes du constructeur : la plupart des objectifs ont été atteints et il y a eu encore de nombreux progrès.
La méthode de SpaceX est itérative : démontrer certaines fonctionnalités de son système au fur et à mesure des vols. Il faut dire qu’il est sans doute bien difficile de simuler toutes les étapes de la mission du lanceur géant qu’est le SuperHeavy/Starship, avec ses 121 mètres de haut, et dont les 2 étages aspirent à être réutilisables.
D’ailleurs les principaux objectifs de ce 4e vol test ou IFT-4 (In Flight test 4) étaient de démontrer les capacités aux étages de revenir vers le sol et de se « poser » en douceur sur la mer. Il n’était pas prévu d’essais de transfert de l’oxygène liquide entre le réservoir avant d’atterrissage et le réservoir principal, contrairement à ce qui avait été fait pendant l’essai IFT-3.
Le décollage de l’ensemble SuperhHeavy B11 et Starship SN29 a eu lieu à 12h50 UTC depuis la Starbase de SpaceX au Texas.
On notera toutefois qu’un (voire 2) des 33 moteurs Raptor du premier étage SuperHeavy s’est rapidement éteint, n’empêchant la fusée, environ 2 fois plus puissante que la Saturn V lunaire, à s’élancer dans le ciel.
Le « hot staging« , allumage à chaud du Starship, où 6 moteurs s’allument pendant que le booster SuperHeavy est encore en train de pousser avec ses moteurs, s’est correctement déroulé. Cette amélioration entrée en service lors du 3e test permet de garder les ergols du Starship au fond des réservoirs et éviter les désagréments rencontrés lors du 2e vol.
L’une des nouveautés du vol est venue ensuite avec le largage de l’anneau inter-étage. Cet anneau pèse environ 10 tonnes et donc le largage permet d’alléger le booster SuperHeavy. Selon certaines analyses cette partie aurait pu se détacher sans contrôle lors du 3e vol, ce qui aurait donc déstabilisé le SuperHeavy lors du 3e vol. Le Booster 11 est d’ailleurs très certainement plus lourd que ses prédécesseurs à cause de nombreuses modifications identifiées : ajout de bonbonnes de CO2, renforts de moteurs et boucliers anti-débris autour des moteurs, ajout de batteries, ajout de raidisseurs sur toute la structure, ajout de renforts sur les grids fins, …
L’objectif principal du SuperHeavy pour ce 4e vol d’essai a été atteint
Le SuperHeavy a ensuite effectué sa manœuvre de retournement et entamé son retour vers la mer. Lors de la phase finale de descente du booster, celui-ci a rallumé 3 moteurs Raptor pour l’atterrissage, le « landing burn ». Cela a permis au booster d’effectuer un “landing” dans le golfe du Mexique après 7 minutes et 24 secondes de vol, réduisant sa vitesse à zéro à la surface de l’océan avant de basculer.
Des images diffusées le 8 juin par SpaceX montrent les dernières étapes du retour filmées depuis un avion, puis une bouée, ne laissant pas de doutes à ce succès, malgré l’explosion, semble-t-il, d’un des moteurs :
Starship a en grande partie survécu à la rentrée jusqu’à l’amerrissage
Pendant ce temps, le Starship a atteint une trajectoire quasi orbitale en effectuant quasiment un demi-tour de la Terre et montant à 213 km d’altitude. Au-dessus de l’Océan Indien, Starship a effectué sa rentrée contrôlée dans l’atmosphère terrestre.
Suite au 3e vol, Starship a subi plusieurs modifications destinées à améliorer son contrôle d’attitude (le Starship était complètement hors de contrôle en fin d’IFT-3) avec l’ajout de moteurs de contrôle de roulis. Les observateurs ont également noté du bouclier thermique constitué de tuiles collées, particulièrement sur le nez du Starship.
Starship a maîtrisé sa rentrée atmosphérique avec précision, notamment grâce à ses ailerons. Il a atteint avec succès le pic de chaleur, le tout à une vitesse hypersonique (environ 20 000 km/h). Il nous a été possible de suivre cette descente et le plasma entourant le vaisseau grâce à une liaison directe et quasi continue avec les satellites Starlink.
L’allumage des 3 moteurs centraux du Starship a été effectué à quelques centaines de mètres d’altitude. Starship a « plus ou moins » survécu à sa rentrée atmosphérique, avant d’amerrir après environ 65 minutes de vol. On notera que des morceaux du Starship se décollaient en fin de vol, probablement des tuiles de la protection thermique, mais aussi des morceaux de l’un des 2 volets de contrôle d’attitude du second étage.
Elon Musk a déclaré après le vol qu’une version plus récente du Starship a les volets avants décalés du côté « sous le vent ». Cela contribuera à améliorer la fiabilité, la facilité de fabrication et sa tenue en orbite.
SpaceX a l’ambition de la réutilisation rapide du SuperHeavy. L’entreprise espère tester rapidement le retour du booster sur la zone de décollage et la récupération par les bras articulés de la tour de lancement. SpaceX a déjà procédé à une amélioration non négligeable du système de ravitaillement : le remplissage du premier étage s’effectue désormais en 50 minutes au lieu de 1h30 auparavant (méthane puis oxygène liquide).
L’administrateur de la NASA, Bill Nelson, a également salué le vol comme une étape vers le développement d’une version d’atterrisseur lunaire de Starship que l’agence prévoit d’utiliser pour son programme Artemis : “Félicitations SpaceX pour le vol d’essai réussi de Starship ce matin ! «
Il faut rappeler que le Human Landing System (HLS) basé sur Starship doit être opérationnel pour fin 2026 si l’on suit le planning de la NASA, et il faudra une quinzaine de lancements et du ravitaillement en orbite terrestre pour démontrer l’efficacité et la fiabilité du système.
Le rythme des lancements du Starship pourrait s’accélérer car SpaceX a obtenu des exceptions de la part de la FAA (Federal Aviation Agency) qui délivre les autorisations de vol : défaillance du système de protection thermique du véhicule lors de la rentrée du Starship, défaillance des volets du véhicule pour assurer un contrôle suffisant lors de la rentrée et défaillance des moteurs Raptor lors de la combustion à l’atterrissage. La FAA a déclaré que si l’une de ces défaillances se produit, une enquête ne sera pas nécessaire à condition qu’elle n’entraîne pas de victimes ou de dommages matériels à des tiers, ni de débris en dehors des zones à risque approuvées.
SpaceX va en apprendre encore davantage avec les données de ce 4e vol test et ils amélioreront sans doute encore leurs prototypes en cours de production pour les prochains vols. Le cinquième vol d’essai pourrait avoir lieu d’ici quelques mois !
Pour revoir le vol dans son intégralité : https://twitter.com/i/broadcasts/1OwxWYzDXjWGQ
Images de couverture : crédit SpaceX